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Euro 2016

Voyage au pays du handball volcanique

, par Lövgren

islande

Dans quelques heures, l'Islande recevra la Serbie à Reykjavik avant de s’envoler pour Belgrade dans cette double confrontation du groupe 4 des qualifications à la phase finale du championnat d’Europe 2016, en Pologne. L’équipe nationale, sur le déclin depuis quelques années, n’aura pas le droit à l’erreur après une défaite contre le Monténégro en novembre dernier.

Plongée dans ce minuscule pays singulier mais ô combien important dans le monde du handball.

Dans ce pays de 330.000 habitants (soit 15,000 de moins que la ville de Nice intramuros), le handball n’est pas « juste un sport » mais vraiment une religion, un mode de vie. Le président de la république d'Islande, Ólafur Ragnar Grímsson parle de ce sport et des joueurs comme la fierté de la nation.« N’importe quel enfant de 10 ans peut vous donner tous les noms des joueurs de l’équipe nationale, nos champions sont comme Wayne Rooney au Royaume-Uni » racontait le président lors des JO 2012 à Londres. Les journalistes furent d'ailleurs étonnés de la sympathie si prononcée d'un chef d’état, qui avait d’ailleurs finit par conseiller aux américains de commencer à jouer au handball.

80% du pays assiste à la finale des JO 2008

Petit retour en 2008, l'Islande affronte la France en finale des JO et s'incline logiquement 28-23 contre la future bande des Experts. Et selon le président Grimsson, interviewé par le magazine américain à la sortie du premier match de poule des JO 2012, la médaille d’argent aux JO de Pékin a sonné comme « le plus grand exploit sportif de l’histoire islandaise ». Et difficile de lui donner tort, puisque l'Islande fut le plus plus petit pays de l’histoire olympique à obtenir une médaille dans un sport collectif lors de ces JO. Sur l'île volcanique, 80% du pays assiste à la finale et 40.000 personnes, soit 15% de la population, ont accueilli les vices champions olympiques dans la capitale Reykjavik. Tout simplement exceptionnel.

Mais entre 2008 et l'olympiade de 2012, l’Islande a terriblement souffert de la crise financière, plongeant le pays dans de sombres bilans financiers et sociaux…

Les handballeurs vulcains qu’on surnomme « Strákarnir okkar » littéralement « nos garçons » sont alors l'une des seules choses qui redonne le sourire aux Islandais qui connaissent une explosion du chômage. Dans un contexte national délicat, l’équipe s'apprête à disputer l’Euro 2010 en Autriche, la compétition internationale la plus relevée au monde. Le résultat fut saisissant : nouvelle médaille mondiale pour l’Islande avec une 3ème place acquise contre la Pologne (29-26).

"Je n'ai plus d'argent, mais on a le handball"

Sur cette quinzaine, la population a vraiment soufflé et respiré handball selon un journaliste télévisuel islandais. Il raconte que la seule chose que demandait la population était du handball et de la joie. Preuve que le sport peut encore être un vecteur important sur une société, il se souvient d’une phrase prononcée par une femme lors d’un reportage télévisé « Je n’ai plus d’argent, mais on a le handball, nous tous ensemble, nous avons ce sport ». Saisissant, et bien évidemment inimaginable en France.

Edmur Gudmundsson, le coach Islandais durant la campagne à l’Euro, rejoint par Hallgrimmson, le joueur de Nîmes, décrivaient l’importance pour eux, de faire à nouveau quelque chose de grand à l’occasion d’une compétition internationale, afin de donner du mérite et du bonheur à la population qui souffrait au quotidien. L’attaché de presse Islandais, M. Thorolfsson décrit le leader de l’équipe à l’époque, Olafur Steffanson comme un penseur et catalyseur hors pair. Selon l’attaché de presse, l’ancien arrière droit de Ciudad Real, refuse catégoriquement de parler de la petite taille de leur pays, mais préfère démontrer ce qu’on peut faire avec de l’intelligence et de la foi envers les autres. « C’est désormais dans les valeurs du peuple islandais ».

Islande

Et ce n'était d'ailleurs pas pour rien que le célèbre magazine américain TIME avait défini l’équipe islandaise de handball comme la plus importante équipe des Jeux Olympiques en 2012 tant son apport social dépasse le cadre sportif.

Désormais en 2015, nous avons tenu à savoir comment était désormais perçu le handball en Islande avec le déclin amorcé depuis quelques années, quelles étaient les infrastructures en place et la politique de formation mise en place pour réintégrer l'élite du handball mondial.

Le Handball est arrivé en Islande en 1920, et a connu son premier match officiel en 1950 contre la province danoise des îles Féroé. Depuis, le handball n’a jamais quitté le pays. Cela en est même devenu le sport roi, loin devant le football.

Le sport a vraiment pris une grosse dimension dans les années 1960, avec la détection de talents précoces, portés par les valeurs physiques et morales de ce sport, toujours présentes dans le jeu Islandais. Deux années marquent la progression du handball en Islande. - 1984 : Première participation aux Jeux Olympiques de Los Angeles, aidés par le boycott des pays du bloc communiste. - 1986 : Vainqueurs du championnat du monde B

Ces deux aboutissements n’ont pourtant pas forcément aidé les clubs islandais, qui dans les années 90 ont vu partir leurs jeunes talents, recrutés dans de grandes équipes européennes, notamment au Danemark et au nord de l’Allemagne, où les jeunes s’adaptent très bien au mode de vie peu différent du leur. Ce choix de laisser partir les talents, fut bénéfique des années plus tard, non pas pour les clubs mais pour l’équipe nationale, notamment aux JO de Beijing en 2008.

Le pays jouit de belles infrastructures, comptant quasiment autant de salles de sports que de terrains de football.

Alors oui, les clubs nationaux n’existent pas au niveau européen, le Haukar Hafnarfjörður et le ÍB Vestmannaeyja ; respectivement vices et champions d’Islande, n’ont pu passer le premier tour de qualification de la coupe EHF cette année. Les deux plus gros clubs de l’île ne peuvent malheureusement pas retenir les joueurs attiré par les sirènes du continent. Aron Palmarsson, dernière star en date à s'être exilé très tôt, est passé par Hafnarfjörður, avant de rejoindre Kiel en 2009, à seulement 18 ans.

Une nouvelle ère

Aujourd’hui, l’heure est à la transition en sélection nationale. L'équipe est vieillissante depuis l’exploit olympique, mais compte sur de jeunes talents comme Aron Palmarsson et Stefan Rafn Sigurmannsson pour faire avancer l’équipe dans une nouvelle ère. La sélection compte d’ailleurs deux nouveaux joueurs (Pétur Júníusson, 22 ans, et Egil Magnússon, 19 ans) dans ses rangs dans cette double confrontation contre la Serbie, évoluants tous les deux sur l'île volcanique. Nul doute que leurs performances seront scrutées par les clubs européens.

De plus, une académie spécialisée vient d’être instaurée il y a quelques mois au sein de la fédération, tenant à rattraper le retard sur les autres fédérations européennes en terme de suivi et de formation. 64 (32 garçons et 32 filles) jeunes talents repérés dans toute l’île, seront soumis à des entraînements quotidiens et intensifs pendant quelques mois. Un véritable pôle espoir où les handballeurs seront dirigés par le coach national lors de certaines séances vidéos et psychologiques, mais dont l’instructeur principal, ne sera ni plus ni moins que la légende vivante Olafur Stefansson.

Olafur Stefansson

Par ce biais, la fédération veut franchir un palier et devenir un taulier dans la formation de joueurs professionnels. Les 64 joueurs seront basés dans la capitale, évoluant fréquemment dans la salle multifonctions Laugardalshöll, où l’équipe Islandaise évoluera ce soir contre la Serbie.

La détection de joueuses féminines aidera également à l’avènement international d’une équipe féminine, qui aujourd’hui, peine à rayonner au niveau mondial, contrairement à leurs homologues masculins.

Le coaching islandais aux manettes

La principale fierté pour la fédération aujourd’hui n’est pas forcément les joueurs mais plutôt le système d’entraînements et les coachs. Au siège de la fédération, on nous énumère fièrement les entraîneurs présents à la tête de grandes équipes et sélections internationales. Et c’est vrai que la liste est alléchante. Petit florilège : Gudmundur Gudmundsson (ancien séléctionneur national, coach de Rhein Neckar Lowen et désormais sélectionneur du Danemark, reconnu comme l’un des meilleurs coachs au monde), Alfred Gislasson (THW Kiel), Dagur Sigurdsson (Berlin et sélectionneur de l'Allemagne), Patrekur Johannesson (Sélectionneur de l'Autriche), Erlingur Richardsson (Berlin la saison prochaine)…

La qualité principale de ces entraîneurs et meneurs d’hommes est la capacité d’amener, plus tôt que n’importe quels autres pays, la soif de vaincre aux jeunes talents. L’héritage Viking donne aux jeunes joueurs des valeurs de combats très précises et guerrières, dès le plus jeune âge. Néanmoins, ce peuple est très respectueux et le combat a toujours lieu dans les règles. Depuis des années, cela nous offre l’image de guerriers atypiques, à l’image du génial Robert Gunnarsson, pivot du PSG Handball.

gunnarsson-islande

Place désormais aux éliminatoires avec cette double confrontation contre la Serbie, où l’Islande devra s’imposer au moins une fois pour consolider sa deuxième place, directement qualificative. Un tel pays, une telle culture et une telle équipe ont obligation, rien que pour notre plaisir, de prendre part à ce futur Euro, et il en sera de même en 2017, à l’occasion de notre mondial, en France.

Corentin Carneau

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