Euro (M)
Les Hispanos, quel caractère !
Dans un environnement qui lui était hostile, l'Espagne a fait preuve de sang-froid pour conserver son titre européen au bout du suspense face à la Croatie (22-20). Les Espagnols accrochent du même coup leur qualification directe pour les Jeux olympiques.
Igor Karacic tergiverse, fait bien trop de pas. Sur l'action suivante, dans la dernière minute, Alex Dujshebaev trouve la faille. Clutch, comme contre la Slovénie en demi-finale. Lino Cervar pose son temps-mort, et juste après, Luka Stepancic tente l'impossible. Rate. Et d'un coup, le silence. Il reste vingt secondes, les Espagnols ont le ballon, et les 17.769 spectateurs de la Tele2 Arena de Stockholm, majoritairement derrière la Croatie, comprennent : l'écart de deux buts ne sera pas comblé. Ils accusent le coup, pendant que le groupe de supporters espagnols exulte, comme ses joueurs sur le terrain. En zone mixte, Ferran Solé n'en revient toujours pas : "Je pensais pas qu’on arriverait à gagner deux fois de suite. C’est incroyable." Juste avant, on avait vu à l'inverse Marin Sego traverser la zone mixte sans un mot, avec les yeux rouges...
La force défensive espagnole, la clé du succès
Le début de rencontre n'est pourtant pas à l'avantage des Espagnols. Après un premier quart d'heure équilibré, les Croates creusent l'écart à un moment où la Roja ne trouve plus de solutions. Le but de Marino Maric, esseulé dans l'axe à six mètres, donne trois buts d'avance à la Croatie (7-10, 19') et précipite les changements tactiques pour Jordi Ribera : exit la 5-1 avec Alex Dujshebaev en poste avancé, retour à la bonne vieille 6-0 avec l'entrée du solide Gedeon Guardiola dans l'axe. L'efficacité défensive revient : avec en plus la bonne entrée de Gonzalo Pérez de Vargas, qui repousse notamment un penalty de Domagoj Duvnjak (6/8 en 11 minutes !), les Croates ne marquent pas pendant plus de dix minutes. L'entrée de Jorge Maqueda amène aussi du tranchant à l'attaque espagnole, le meilleur arrière droit de la compétition scorant trois fois de suite pour ramener les Espagnols à hauteur de leurs adversaires. Les Croates stoppent leur traversée du désert avant la pause, mais sont désormais menés (12-11, 30').
L'Espagne parvient à faire de nouveau l'écart en début de seconde période (16-12, 36'), mais la réponse défensive de Lino Cervar porte enfin ses fruits : Ilja Brozovic et Marko Mamic, dans l'axe, apportent un nouveau souffle aux Croates qui reviennent dans le match (18-18, 49'). A deux minutes de la fin, le score est toujours de parité (20-20, 58'). Avant le dénouement de la dernière minute... "On a réussi à revenir après quatre buts d'avance, on a perdu cette avance, regrette le capitaine Domagoj Duvnjak. C'est le sport, des détails décident du scénario du match." Les Espagnols ont surtout réussi à se reconcentrer sur leur point fort : la défense, très solide dans une fin de rencontre où très peu de buts sont marqués. "Quand ils sont revenus, on savait qu’ils allaient jouer jusqu’au bout. Ils ne lâchent jamais rien, on s’y était préparé, on en avait discuté avant. Le mental, ça a été la force de l’équipe ce soir. Il fallait aider Gonzalo à faire des arrêts alors qu’on était bloqué en attaque. C’est ça qui nous a fait gagner", rapporte le défenseur Viran Morros. "On a marqué que 20 buts, c'est trop peu", lâchait de son côté Duvnjak.
L'Espagne qualifiée pour les JO
Pour la Croatie, qui a livré un deuxième gros combat après l'épique rencontre de vendredi contre la Norvège, le coup est rude. "Ça fait très mal. Mais d'un autre côté, nous sommes fiers d'avoir obtenu la médaille d'argent", affirme Domagoj Duvnjak, qui passe encore à côté d'un titre en sélection, dix ans après sa dernière finale en 2010. Le titre de MVP de la compétition et du match n'a dès lors que peu d'importance... "Je les échangerais immédiatement contre une médaille d'or, certifie-t-il. Ça signifie bien sûr beaucoup pour moi, mais une médaille d'or est une médaille d'or."
"Ce soir, on a eu des moments très difficiles, où on avait beaucoup de mal à marquer des buts, se félicitait de son côté Ferran Solé. On a su garder le niveau en défense, avec des gardiens qui nous ont sauvé beaucoup de ballons. Quand on ne marquait pas beaucoup de buts, on a réussi à tenir le match en défense." 18 ans après la performance de la Suède de remporter un troisième titre européen consécutif, c’est à Stockholm, sous les yeux des Bengan Boys que l’Espagne est la deuxième équipe à conserver son titre de champion d’Europe. Mais aussi de se qualifier pour les Jeux olympiques, quatre ans après avoir manqué l’olympiade de Rio. "A la fin du match j’étais un peu ému à cause de ça", sourit Morros. Après un tel combat, même quand on a montré un tel caractère pour remporter une finale, on peut bien aussi lâcher quelques larmes...
A Stockholm, Mickaël Georgeault avec Kevin Domas