Transilvania Express, l’exode des joueuses françaises en Roumanie (1/3)

Depuis de nombreuses saisons, les joueuses françaises s’exportent dans les plus grands championnats européens et dans les clubs historiques de la ligue des champions. Cet été, encore, ces pays attirent et notamment la Roumanie.

Le premier épisode de ce dossier est consacré à la revue des troupes bleues en Transilvanie et une première interview d’Amandine Balzinc, ex-capitaine et gardienne de Toulon.

La Roumanie, terre d’accueil de grands noms du handball français féminin, a vu passer Allison Pineau, Amandine Layneau, Laurisa Landre, Camille Ayglon-Saurina, Alexandra Lacrabère ou Siraba Dembélé-Pavlovic, dans ces clubs de Bucarest et Vâlcea, notamment.

Pour cette la nouvelle saison, les clubs roumains se sont renforcés pour disputer les joutes européennes et un championnat de la Liga Florilor qui s’étoffe à nouveau. Parmi les recrues, des joueuses de LBE et, à nouveau, des internationales françaises qui ont fait leurs valises en direction de l’Europe de l’Est.

 

Histoire du championnat

Actuellement 6^ème au ranking européen, le championnat de Roumanie a connu des périodes plus ou moins fastes. Troisième en 2010 avec la finale de Ligue des Champions de Râmnicu Valcea, redescendue à la septième place en 2015 puis de retour sur le podium en 2018 et 2019 avec le titre du CSM Bucarest en 2015 et leur participation au Final 4 en 2017 et 2018, le championnat oscille au gré des résultats européens et des finances des clubs. Le club de Valcea, le plus titré en Roumanie, a fait faillite en 2013, avant de revenir au plus haut niveau avec l’aide de la ville. Le Rapid Bucarest, deuxième du classement la saison passée, a connu des déboires financiers et des déboires sportifs avec une relégation avant de retrouver la première division en 2019. Le CSM Bucarest, champion en titre, a été créé en 2007 et a connu rapidement l’accession en première division en récupérant, notamment, 11 joueuses et le coach du Rapid, suite à leur problème financier. La stabilité financière des clubs remet rapidement en question la réussite sportive. Une chose est sure, le championnat roumain attire de nouveau, avec les clubs de la capitale en tête de proue, où le niveau est très homogène et où chaque week-end réserve son lot de surprises. Au-delà de l’aspect sportif, les joueuses peuvent être attirées par de bonnes conditions de travail, un engouement des supporters envers le handball féminin mais aussi par un aspect financier, qui ne peut être mis de côté.

Les clubs rivaux de la capitale et la quête du Final 4

Né de la concurrence féroce entre les clubs sportifs de la capitale roumaine, le handball féminin ne fait pas exception. Le CSM Bucarest et le Rapid Bucarest se disputent le championnat et la quête de Final 4 en Ligue des Champions.

 

L’année dernière, le CSM Bucarest, champion de Roumanie, comptait dans ses rangs quatre françaises : Laura Glauser, Grâce Zaadi, Kalidiatou Niakaté et Siraba Dembélé-Pavlovic. Si les deux premières citées restent au club, Niakaté quitte la Roumanie en direction du Monténégro pour rejoindre le club de Budućnost Podgorica et Dembélé-Pavlovic a mis un terme à sa riche carrière. Cet été, le CSM accueille une nouvelle internationale : Laura Flippes. En quête d’un nouveau challenge, après Paris 92, et d’un retour en Ligue des Champions, la française de 28 ans, désormais utilisée sur la base arrière, complète un effectif ambitieux, mené par Crina Pintea et Cristina Neagu, quatre fois élue meilleure joueuse par l’IHF. Dans le Pot 1 de la Ligue des Champions aux côtés des cadors (Gyor, Metz, Vipers, Team Esbjerg), le club roumain retrouvera Brest dans le groupe A.

Chez le rival du Rapid Bucarest, deuxième du dernier championnat, deux françaises étaient présentes : Orlane Kanor et Alexandra Lacrabère. Deux destins différents puisque Lacrabère avait été écartée du groupe à la mi-saison alors qu’Orlane Kanor faisait des joueuses clefs de la base arrière du Rapid. Cette année, Laura, sa sœur jumelle, rejoint le Rapid après huit saisons au Metz Handball. L’ailière gauche, en fin de contrat et non-conservée par le club lorrain, retrouve sa sœur, une saison seulement après s’être quittées. Les sœurs Kanor vont retrouver Metz dans le groupe B de la Ligue de Champions. A Bucarest, Laura Kanor va pouvoir en fin jouer les premiers rôles et pourquoi pas bousculer la hiérarchie des ailières gauche en équipe de France, à un an des JO de Paris.

Gloria Bistrita, Mioveni, ou encore Brasov, des françaises dans toute la Roumanie

Des françaises, nous en retrouveront aux quatre coins de la Roumanie. Au départ de Paris 92, tout comme Laura Flippes, Gnosiane Niombla revient en Transilvanie 5 ans après sa première aventure avec le CSM Bucarest. Cette fois, elle retrouvera les joutes européennes en European League avec le club de Bistrita, le CS Gloria 2018, club jeune mais néanmoins très ambitieux. Troisième du championnat et quart-de-finaliste de l’EL la saison passée, Bistrita se place parmi les prétendants au Final 4. Elle rejoint Déborah Kpodar, au club depuis l’hiver 2022, et passée par Metz, Dijon et Nantes.

Du côté de Mioveni, qui a disputé et remporté les Play-Down en 2023, Amandine Balzinc, ex-capitaine et gardienne de Toulon, arrive avec sa coéquipière du TMV Armina Isic et Ivanei Deziz en provenance de Besançon. En quête d’une nouvelle expérience, Amandine Balzinc est revenue à la compétition en janvier 2023 suite à une rupture du tendon d'Achille.

Enfin, Laura Lasm, qui avait quitté la JDA Dijon pour Brasov, qui évoluait alors en D2, découvrira la Liga Florilor.

A noter également les arrivées de Nathalie Hagman au SCM Râmnicu Vâlcea, en provenance des Neptunes de Nantes, déjà passée par le CSM Bucarest et de Lara González Ortega, au Rapid Bucarest, fer de lance de la défense du Paris 92.

Amandine Balzinc, nouveau départ

A l’occasion de ce dossier spécial Roumanie, Amandine Balzinc, partie de Toulon cet été, nous raconte son départ et ses nouvelles ambitions au club de Mioveni.

HN : « Amandine, après trois saisons à Toulon, être devenue capitaine, avoir connu une longue période d’absence suite à votre blessure, un nouveau chapitre arrive dans votre carrière : une première expérience à l’étranger. Pourquoi avoir fait le choix de quitter le TMV pour la Roumanie ?

AB : « En décembre 2021 j’ai fait le choix de signer pour une saison supplémentaire uniquement au TMV. Dès lors, je souhaitais me donner les moyens pour que cette saison 22/23 sous ces couleurs soit ma dernière. La gestion humaine et les objectifs sportifs du club prenaient une direction qui ne me correspondait pas. Je voulais me donner cette saison de transition pour me mettre dans les meilleures conditions sportives et poursuivre ma carrière. Mon objectif était de rejoindre un club de niveau européen et/ou de rejoindre la Liga Florilor Mol. Lorsque j’avais 15 ans, dans ma première équipe de 1^ère division, plusieurs joueuses vantaient les mérites de ce championnat. L’envie de le découvrir par moi-même était semée. Après un très bon début de saison 2021-2022, à Toulon, vient ma blessure au tendon d’Achille en mars. Mes objectifs restant les mêmes, ma reprise de la compétition en Janvier 2023, après 10 mois,  aurait pu contrarier mes plans. J’ai eu conscience que les moyens mis en place au sein du TMV ne me permettraient pas d'atteindre mes objectifs. Avec le travail mis en place à Saint Martin Sport, au CERS de Capbreton et sur Orléans avec Florin Vasilcan, j’ai pu retrouver un niveau de performance acceptable et rejoindre la Roumanie. Mon choix pour la Roumanie faisait partie de mes envies bien avant que je sache que je serai en mesure d’en faire un objectif. »

HN : Des nombreuses joueuses de LBE arrivent dans le championnat : Laura Flippes, Nathalie Hagman, Lara Gonzalez, Gnonsiane Niombla ou Laura Kanor. Comment expliqueriez-vous cet exode pour la Liga Florilor MOL ?

AB : « Je n’aurais pas la prétention de l’expliquer pour ces belles joueuses qui ont toutes fait rayonner le championnat de LBE ces dernières années. Toutes ces joueuses internationales doivent peut-être avoir besoin de nourrir leurs expériences sportives pour passer des palier dans leur carrière. Ce pourrait être ma lecture de la situation. Aujourd’hui nous sommes face à des joueuses qui nous sont moins familières que dans le championnat de LBE. Personnellement, toutes les personnes qui me parlaient de la Liga Florilor Mol évoquaient une ligue où les sportives sont dans les meilleures conditions de performance. Aujourd’hui sur place, je prends pour exemple la présence d’un kinésithérapeute et d’un masseur à chaque entraînement, la présence dans le gymnase d’un sauna et d’un protocole de cryothérapie. L’engouement pour le handball féminin est fort et j’ai hâte de le découvrir par moi-même durant le championnat. »

HN : Le CS Dacia Mioveni s’est maintenu en fin de saison, un scénario que vous avez déjà connu à Toulon. Avec un effectif très remanié, quelles sont les ambitions du club cette année ?

AB : « Le CS Dacia Mioveni souhaite challenger un maximum d’équipes cette année et jouer les troubles fêtes. Nous savons que la tâche demande de l’abnégation pour notre effectif qui doit intégrer une majorité de nouvelles joueuses. Nous souhaitons engranger le plus de confiance et de plaisir à jouer collectivement et nous savons que cela passera par des victoires à domicile. »

HN : Vous arrivez avec deux autres pensionnaires de LBE, dont Armina Isic, qui était avec vous au TMV. Comment s’est passée l’intégration ?

AB : « J’ai le plaisir d’être dans un groupe de femmes expérimentées et anglophones très accueillant. Dès ma première journée j’ai pu intégrer quelques mots en roumain et j’espère m’améliorer rapidement. Nous avons des cours depuis trois semaines déjà ce qui est bénéfique pour la vie du groupe sur et hors terrain. Je prends beaucoup de plaisir à découvrir la Roumanie, c'est un très beau pays qui mériterait d’être davantage mis en avant pour ses richesses naturelles. »

HN : Enfin, vous allez défendre les cages de Mioveni aux côtés Viktoria Timoșenkova et Mădălina Ion, comment vivez-vous cette concurrence ?

AB : « La seule concurrence qui m’importe est celle que je mène avec la joueuse que j’étais la veille. J’ai toujours pensé qu’il serait bon de mettre davantage en avant la cohésion et la complémentarité des joueuses sur un même poste. Vicky, Mada et moi sommes trois profils de gardiennes différentes. L’essentiel se trouve dans le fait que la gardienne la plus performante pour le bien du collectif soit sur le terrain. Je donnerai chaque jour le meilleur de moi-même pour le bien du groupe. »

Rendez-vous prochainement pour un nouvelle épisode consacré à Laura Kanor.

 

Thomas Mathiot