Le handball au pays de la démesure

Alors que le Mondial 2015 rentre dans sa dernière ligne droite, il restera à coup sûr dans l'histoire pour avoir été celui de la démesure. Handnews vous emmène dans les allées du Lusail Hall, qui accueillera la finale dimanche prochain.

Le Qatar est régulièrement au cœur de l'actualité sportive depuis le rachat du PSG par Qatar Sport Investment (QSI). Objet de tous les fantasmes et de tous les commentaires, ce petit état est peuplé de 2,1 millions de personnes mais seulement 20% de la population a la nationalité qatarie. La grande majorité des personnes qui vivent au Qatar sont donc des immigrés, notamment pakistanais, indiens ou népalais, qui construisent les nombreux buildings qui composent la ville dans des conditions de travail difficiles ou d'expatriés européens ou nord-africains. Ces derniers se sont notamment fait remarquer lors des matchs de leurs équipes nationales.

Le sport, élément majeur du soft-power qatari

Le Qatar a toujours eu l'ambition de devenir une nation importante sur la scène internationale depuis l'accession au trône du cheick Hamad ben Khalifa al-Thani en 1995. Tamim ben Hamad Al Thani est désormais à la tête du pays. Mais comment obtenir une place majeure sur l'échiquier mondial? Grâce aux médias (Al-Jazeera), mais aussi au sport.

Le sport est depuis toujours un outil au service des relations internationales. Il permet de véhiculer une bonne image du pays à l'étranger, d'assurer un certain prestige en présentant des athlètes lors des compétitions internationales, d'affirmer son indépendance, mais aussi d'élargir son influence dans le monde. « Il est plus important d'être reconnu au Comité International Olympique (CIO) qu'à l'Organisation des Nations Unies car tout le monde respecte les décisions du CIO », expliquait déjà l'ancien émir Hamad ben-Khalifa Al Thani, dans les années 2000. Ainsi, c'est en 1993 que le Qatar a lancé son programme de développement sportif en accueillant le tournoi de tennis de Doha, affilié au circuit mondial des tennismen professionnels, l'ATP. Quatre ans après, le Qatar accueillait sa première compétition annuelle d'athlétisme. Devant le succès et la réussite organisationnelle de ces deux événements, les dirigeants qataris se sont alors lancés dans la création de nombreux autres événements : un tournoi de golf baptisé Commercial Bank Qatar Masters en 1998, l'Open du Qatar de tennis de table en 2002 mais aussi le Tour cycliste du Qatar, dont la première édition eut lieu la même année. Une compétition de motocross et une épreuve équestre en 2004 furent créées ensuite; les Masters de tennis féminin en 2008 et l'organisation des championnats des clubs champions en handball et volleyball depuis 2010 complètent le tableau des événements sportifs qui se déroulent chaque année au Qatar. Les championnats du monde de natation en petit bassin se sont également tenus à Doha en décembre dernier et le pays s'apprête à accueillir, en 2022, la Coupe du Monde de football.

Un chantier à ciel ouvert

Doha est un véritable chantier à ciel ouvert. Le nombre de grues est impressionnant tout au long de la ville, symbolisant parfaitement la frénésie de construction de l'émir et du reste du gouvernement. Toutes les folies sont donc permises. Ainsi une gigantesque zone industrielle est en cours de construction au sud-est de Doha (photo ci-contre). Avec des bâtiments à perte de vue sur plusieurs kilomètres, dont la plupart sont encore vides aujourd'hui. Et le seront peut-être encore demain. Dans le quartier de The Pearl, un nouveau quartier constitué de plusieurs blocs de bâtiments attendent aujourd'hui magasins et habitants. Sobrement appelé "Qanat Quartier", il ressemble en beaucoup de points à Venise...

Le Lusail Hall et ses 15.300 places n'échappe pas à cette démesure peu commune. Posée en plein désert, à 40 minutes du centre de Doha en bus, elle se doit de concrétiser les ambitions et le savoir-faire qatari dans l'organisation d'évènements sportifs. En juillet dernier, cette grande Arena était encore en cours de construction. Les qataris ont mis les bouchées doubles pour proposer une salle moderne. Le marketing est soigné, que ce soit dans la salle mais aussi dans la ville. Partout, des drapeaux avec le logo du Mondial et avec le nom des différentes équipes de la compétition sont visibles. Dès leur arrivée à l'aéroport, les visiteurs sont accueillis avec de grandes affiches "Qatar 2015". Pourtant, les salles peinent à se remplir.

Boutiques et salle XXL

De nombreuses boutiques composent le Lusail Hall. Il est ainsi possible d'acheter des produits dérivés BeIN Sports dans une boutique spécialisée. Les allées, très spacieuses, font davantage penser à un centre commercial qu'à une salle de handball. Que restera-t-il des différents bâtiments flambant neufs une fois le Mondial terminé ? Les dirigeants qataris ne s'embarrassent pas de telles questions même si la possibilité de démonter cette salle pour l'envoyer en Afrique a été un temps évoqué... Mais, dans leur volonté de jouer dans la cour des grands, ils construisent à une vitesse impressionnante l'un des futurs stades du Mondial 2022 de football au sein de l'Aspire Zone. Un métro et un tramway sont également attendus. La folie des grandeurs semble sans limite au Qatar.

Quelques photos du Lusail Hall :

Source : BONIFACE Pascal, VERSCHUUREN Pim, BILLION Didier, ABY Romain, « La diplomatie sportive qatarie. Le ‘‘sport power’’ : le sport au service de la reconnaissance internationale du Qatar »