Mondial 2017
G. Margotton : "Très heureux de commenter du hand"
Commentateur vedette du football sur TF1, Grégoire Margotton est une référence dans le monde du journalisme sportif. Formé à l’école Canal+, il va commenter pour la première fois de sa carrière du handball sur TF1 à l’occasion du Mondial (à partir des quarts de finale). Alors que l’évènement arrive à grands pas, il explique à Handnews comment il se prépare et pourquoi il a accepté ce nouveau challenge.
A quelques jours du début du Mondial que vous commenterez sur TF1 à partir des quarts de finale, quel sentiment vous habite-t-il ?
Il y a beaucoup d’angoisse car c’est compliqué d’arriver aux commentaires d’un sport que beaucoup de gens connaissent et pratiquent, alors que je ne l’ai jamais commenté ni même pratiqué. Je l’ai regardé, accompagné et apprécié mais je n’ai jamais commenté de match de hand. C’est une mécanique que je n’ai pas et qu’il faut apprendre.
Comment s’est présentée l’opportunité de commenter le Mondial de handball ?
TF1 me l’a proposé. Je n’avais rien demandé de particulier. J’ai réfléchi deux jours et j’ai dit à ma direction : « allons-y ! » Je serais trop bête de ne pas essayer cela au moins une fois dans ma vie, surtout parce que c’est le Mondial et qu’il a lieu en France. J’espère commenter les trois matches (NDLR : du quart à la finale) car cela voudrait dire que les Bleus iront au bout. J’espère faire partie de cette aventure incroyable, sur TF1 ou TMC. Je n’aurais certainement pas beaucoup d’autres occasions de commenter du hand, hormis avec les filles dans quelques mois également car le groupe TF1 a acquis les droits du mondial féminin. Ce sera plus au coup par coup.
Le groupe TF1 n'est pas habitué à diffuser du handball. Allez-vous adopter un ton plus pédagogue, pour faire découvrir ce sport aux téléspectateurs ?
Je vais commenter pour un très grand public avec, je l’espère, au moins autant de téléspectateurs que lors du dernier mondial au Qatar (NDLR : 9,1 millions de personnes devant la finale). Si c’est le cas, sur ces 10 millions de personnes, il y en a peut-être 300.000 qui connaissent très bien le handball, et les autres beaucoup moins bien. Je parlerai pour eux, et j’essaierai comme dans tous les sports de m’appuyer sur le consultant. C’est Philippe Gardent qui parlera davantage pour les spécialistes. Mon rôle ne sera pas d’expliquer aux gens qu’il se passe un yago ou une défense 0-6 à l’écran. Et si je le fais, ce sera en étant sûr et en demandant à Philippe Gardent d’éclairer les téléspectateurs. J’arrive sur la pointe des pieds, avec mon enthousiasme et l’envie de procurer du plaisir aux gens. Cela va être un super évènement. Je suis très heureux qu’on puisse faire ça sur TF1.
« J’adorerais commenter les Bleus en finale ! »
Comment vous préparez-vous pour commenter du hand pour la première fois de votre carrière ?
Pour parler au plus grand nombre, il faut bosser ! J’avais un mois devant moi, et je peux vous assurer que je suis en plein dedans ! Si j’avais à commenter tous les matches sur BeIN Sports, je n’aurais évidemment pas préparé mon commentaire en un mois mais en six mois. J’aurais demandé à commenter du hand toutes les semaines. Je m’imprègne avant tout des Bleus. J’ai pour l’instant survolé les sélections étrangères, je les travaillerai beaucoup au coup par coup pendant les quelques jours qui précéderont les matches de la France. J’ai regardé beaucoup de matches depuis un mois, notamment de D1 française, et beaucoup écouté mes collègues aux commentaires. J’ai aussi revu des matches du Mondial au Qatar, des JO mais aussi de l’Euro 2016. J’ai beaucoup bouquiné et travaillé, fais des fiches pour maîtriser mon sujet du mieux possible. Je veux absolument éviter de dire des bêtises.
Avez-vous prévu des sessions de rodage avec Philippe Gardent ?
Oui, on va se faire des matches à blanc avec Philippe Gardent. On commentera le match d’ouverture entre la France et le Brésil pour nous, même s’il ne sera pas retransmis sur TF1. L’idée est de commencer à trouver des automatismes, savoir s’effacer derrière son consultant si j’ai un doute sur une décision arbitrale par exemple. Le rythme est très différent du foot ou même du basket que j’ai commenté par le passé sur Canal+ et que j’ai surtout pratiqué. Il ne va pas falloir gueuler dès le premier but, sauf si c’est une roucoulette ou un kung-fu avec un chabala à la finition (rire) ! Il va falloir que j’apprenne et que je m’adapte au hand. J’arrive avec beaucoup d’humilité, et ça fait beaucoup de bien d’être un peu en danger.
Commenter ce Mondial, c’est donc de l’adrénaline pour vous ?
Oui, énormément ! C’est ce qui m’a plus dans l’exercice. Je me suis également rendu compte assez rapidement que le monde du hand était content que ce soit TF1 qui retransmette le dernier carré et que je sois dans l’aventure. Je ne saurais pas l’expliquer mais j’en suis très heureux. Comme j’ai eu beaucoup de chance dans ma vie, je suis presque persuadé que les Bleus seront en finale. J’adorerais commenter ça !
« J’aime les sports collectifs »
Il semble que Frédéric Brindelle vous ait donné quelques conseils pour préparer vos commentaires …
Fred est la première personne que j’ai appelée car j’ai toujours eu de bons rapports avec lui. Les expressions « la voix du foot », « la voix de l’athlé » ou « la voix du hand » m’énervent au plus haut point mais c’est quelqu’un qui a accompagné le hand sur la durée. J’ai travaillé avec lui pendant de nombreuses années à Canal+ et j’estimais que c’était le premier à contacter. On s’est fait un repas tous les deux : on a parlé de hand pendant trois heures ! Il a eu la gentillesse de faire cela. Il commente sans doute beaucoup mieux que moi le hand, j’avais besoin qu’il me donne quelques trucs avant le Mondial. Je le remercie car tout le monde ne l’aurait pas fait. C’est très classe de sa part. J’aurais aussi pu le faire avec Thomas Villechaize, que j’aime beaucoup. C’est quelqu’un qui commente bien et qui a beaucoup plus de repères que moi pour ce genre d’exercice. En tout cas, depuis un mois, je les regarde et les écoute beaucoup.
Avez-vous la volonté d’évoluer sur un mixte entre les commentaires du foot et d’un autre sport, comme a pu le faire Charles Bietry à l’époque ?
J’ai toujours voulu évoluer sur des mixtes. Je n’ai jamais voulu rester uniquement sur du foot, et heureusement. Si je n’avais fait que du foot dans ma vie, je serais devenu fou ! L’athlétisme m’a sauvé la vie pendant des années. C’était mon oxygène de fin de saison. J’ai eu mes plus grands bonheurs de commentateur sportif en couvrant l’athlé. J’aime l’esprit olympique et les sports collectifs. A l’époque, il y avait la place à Canal+ pour plusieurs commentateurs de basket. J’ai donc eu la chance de faire des All Star Game et les JO d’Atlanta avec George Eddy. Je n’étais pas loin des handballeurs en 1992 et 1996 lors des Jeux. De loin, au moins, je n’ai jamais lâché le hand.
Pensez-vous trouver davantage de proximité avec les joueurs, notamment en comparaison du foot où la distance avec les journalistes semble de plus en plus grande ?
Avec les joueurs de foot, c’est fini depuis 15 ans, à moins d’avoir des relations spéciales ou d’avoir les numéros de téléphone des uns et des autres et de les harceler avant une compétition. Cela n’a jamais été ma façon de faire. Concernant le handball, j’ai une anecdote à vous raconter. J’ai été à l’entraînement du PSG car je recevais Luc Abalo sur LCI quelques jours plus tard. Je suis rentré à Coubertin sans problème pour regarder l’entraînement. J’ai été accueilli par Thierry Omeyer sur le parquet alors que je ne l’avais jamais rencontré auparavant. Ce sont des choses qui n’existent plus dans le foot. Je sais que c’est un peu plus compliqué d’approcher les Experts. Ils ont forcément dû se fermer un peu et gérer leur communication. C’est une marque qui génère beaucoup d’argent désormais. Ce sont des pros mais j’espère qu’ils seront plus accessibles que les footeux. Je pourrai le constater jeudi en assistant à leur entraînement à Toulouse. J’ai hâte !
« Je touche du bois pour que les Bleus soient en quart ! »
Avez-vous prévu d’assister à plusieurs rencontres du premier tour ?
Si ma femme n’était pas partie plusieurs jours en déplacement professionnel en Guadeloupe et que je n’avais pas dû garder ma fille, j’aurais été voir tous les matches des Bleus. Je vais aller voir les matches amicaux contre la Slovénie, je vais commenter à blanc le premier match contre le Brésil et je serai à Nantes pour la rencontre contre le Japon. Dès que je le pourrai, j’irai voir les Bleus sur site. Je touche du bois pour que la France soit en quarts de finale. Je vais aussi regarder tous les autres matches à la télé pour m’imprégner des adversaires. Je vais passer un mois à ne regarder que du handball. C’est génial à vivre !
Quelles sélections seront, selon vous, les principaux adversaires des Bleus pour le titre ?
Depuis trois ans, la concurrence me semble de plus en plus forte. L’Allemagne est forte, l’Espagne et la Croatie sont toujours là, le Danemark est évidemment redoutable. C’est ce qui rend ce mondial intéressant. Ce n’est pas le foot en termes de diversité de concurrence, mais c’est plus concurrentiel que le rugby. C’est un vrai sport mondial. Quand vous avez autant de licenciés en France, c’est qu’il est bien ancré, notamment au niveau local avec un remarquable travail de formation.
Un joueur vous impressionne-t-il particulièrement ?
Ma chance, c’est que j’arrive assez frais, notamment parce que j’ai moins de souvenirs handballistiques que d’autres. Je n’ai pas d’idées préconçues, même si je suis plus attiré par un demi-centre ou un joueur capable de tirer à neuf mètres. Un joueur comme Abalo par exemple, c’est de la grâce et de la légèreté. On aura besoin de lui à 2000%. Quand Daniel Narcisse tombe du ciel à 10 mètres, c’est monstrueux aussi. Karabatic ou Guigou ont aussi un jeu passionnant. Il y en a pour tous les goûts dans le hand. J’espère en tout cas que le duo d’entraîneurs va trouver ses marques, et que les Bleus auront rechargé les batteries physiquement. Je crois qu’ils sont bien conscients que gagner un Mondial à la maison aurait un goût particulier, même après tous les titres déjà remportés.
Propos recueillis par Olivier Poignard