Proligue
Une saison de Proligue encore une fois très indécise
Plus de 200 jours après la dernière rencontre officielle, le championnat de Proligue redémarre ce week-end. Et cette année encore, la compétition devrait être très ouverte, en haut comme en bas du tableau.
Une semaine après la Starligue et deux semaines après la N1, la Proligue est le dernier championnat masculin national à reprendre cette saison. Après plus de six mois d’interruption, et une saison dernière terminée sur tapis vert avec le gel du classement après la 18e journée et les montées des deux clubs alors les mieux classés, Cesson et Limoges. Pour redémarrer cette année, « il a fallu faire le deuil de la saison dernière pour repartir sur quelque chose de nouveau », lâche Benjamin Braux, le coach de Nancy, club qui a été stoppé dans son élan pour la course aux play-offs – finalement annulés – la saison dernière.
Une préparation estivale chamboulée
Avec cette longue pause forcée, les clubs ont donc dû composer différemment pour se relancer dans le bain. « On n’avait aucune visibilité sur l’état de forme, sur la manière dont les joueurs avaient pu appréhender d’un point de vue mentale cette coupure », affirme le technicien nancéien, qui souligne néanmoins les avantages de cette configuration originale : « On a repensé notre préparation par rapport aux années précédentes, et c’était assez intéressant, parce qu’on est parfois un peu dans la redondance. Il a fallu sortir de sa zone de confort, et c’était assez riche. » Même chose à Cherbourg, l’un des deux clubs avec Billère qui a changé d’entraîneur à l’intersaison. Pour Frédéric Bougeant, habitué à coacher des équipes féminines, la pause a été plutôt « un avantage » qui a permis à l’ancien entraîneur de Fleury et Rostov de pouvoir s’installer progressivement dans son nouveau club et de prendre le pouls du championnat qu’il va découvrir cette saison, mais aussi d’apporter deux petits ajustements dans son effectif avec les arrivées de Lior Gurman et de Jason Muel. « On a beaucoup travaillé à la vidéo avec le staff, détaille-t-il. J’ai fait l’évaluation des 19 matchs de la JS, ce qui m’a permis de faire une bonne photographie de la Proligue et du club. »
Du côté de Valence, la pause a aussi été mise à profit pour solder une saison dernière compliquée, avec une montée validée à la dernière minute par les instances la saison dernière. Le maintien confirmé dès la fin avril a permis de construire la saison à venir un peu plus sereinement. « Ça nous a permis de faire des choix importants notamment au niveau du recrutement, et d’anticiper l’administratif pour nous concentrer sur le handball, confirme Eric Forets, l’entraîneur drômois. Ça nous a permis de nous structurer pour aborder la saison d’une meilleure manière que l’an dernier, et un peu moins dans l’inconnu que l’an dernier. » Idem pour les deux promus, Angers et Sarrebourg, qui ont eu du temps pour adapter leur structure au monde professionnel, qu’ils vont découvrir ou redécouvrir cette saison.
Un trio qui se détache
Après cette préparation prolongée, la reprise de la compétition commence à être attendue avec impatience par les différents acteurs. « On fait du sport du haut niveau pour la compétition », rappelle Benjamin Braux, qui attend de voir si le travail de son équipe sera validé sur le terrain : « La vraie vie, ce sont les matchs officiels. » Son équipe revient d’ailleurs souvent parmi les clubs cités pour jouer le haut de tableau cette saison en Proligue. « Il se dégage une hiérarchie avec les budgets et les effectifs, affirme Eric Forets. Nancy a très clairement affiché la couleur, a priori c’est l’épouvantail de la poule. Et autour d’eux, il y a quatre-cinq équipes qui ont fait des recrutements qui semblent cohérents. »
Benjamin Braux, le coach du GNMHB, ne dit pas autre chose, même s’il est nécessaire de rappeler que les deux grands favoris de la saison dernière, Cesson et Limoges, ne sont pas montés facilement la saison dernière. « Cesson avait mal commencé le championnat et on ne savait pas ce qu’il en aurait été sur la fin, Limoges finit deuxième avec un point de plus que Massy mais Massy a eu deux points de moins pour des raisons administratives… Le fait que le championnat est ouvert, c’est propre à la D2 », souligne-t-il. Pas question néanmoins de se défiler pour le premier budget de Proligue, le seul à dépasser les 2 millions d’euros pour cette saison*. « À un moment, il faut être capable d’afficher ses ambitions, même si c’est plus facile à dire qu’à faire. Il faut qu’on se donne les moyens d’aller en haut, le club nous donne les moyens pour. Factuellement, l’année dernière on termine quatrième, deux sont montées, aucune n’est descendue. Certaines se sont renforcées, c’est clair, mais quand tu finis quatrième et que les deux premiers ne sont plus là, tu dois te positionner en étant dans la course. On ne sait pas si on va réussir, mais on fera tout pour y arriver. »
A la lutte avec le club lorrain, on devrait retrouver notamment Saran et Pontault-Combault. Le club du Loiret a fait un beau recrutement avec des joueurs parmi les meilleurs de Proligue la saison dernière, dont le meilleur gardien Nicolas Gauthier et le meilleur buteur Théo Avelange-Demouge, en plus des leaders de l’attaque massicoise Tom Robyns et Arthur Muller, et enfin l’ancien capitaine du Cavigal de Nice, Jordi Deumal. Pontault-Combault a certes perdu des cadres comme Luka Sokolic et Théo Avelange-Demouge, mais s’est également bien renforcé, avec notamment l’ancien défenseur de Créteil Fabien Ruiz ou le demi-centre de Sélestat Nicolas Schneider. Revenu en Proligue en 2019 après une expérience d’un an dans l’élite, le club du 95 pourrait bien se mêler à la lutte pour les premières places du championnat cette saison.
Un large « deuxième wagon » et une course au maintien indécise
Derrière ces trois clubs, il y a un « deuxième wagon », comme l’explique Frédéric Bougeant, le coach de Cherbourg, qui y voit notamment Massy, « qui maîtrise totalement le niveau et qui est une équipe qui arrive à bien jouer même avec des contraintes budgétaires », Sélestat, qui « ne devrait pas laisser sa part au chien », tandis qu’« on a vu qu’aller jouer à Nice n’était jamais simple ». Des équipes comme Dijon, après un dernier exercice compliqué, ou Billère, pourraient également également se mêler à la danse, tout comme Cherbourg : « Les dirigeants aimeraient bien que Cherbourg devienne d’année en année un club stable sur les play-offs, déclare Frédéric Bougeant. Le début d’année dernière a mis l’eau à la bouche à tout le monde. On sent de l’enthousiasme et l’envie de se frotter aux grosses écuries. » Le nouveau coach de la JSC est heureux d’avoir rejoint « un club qui a envie de franchir un pallier. Après une première période de cinq ans à cet étage, je ressens au club l’envie de franchir des étapes, ce qui me va bien car j’ai toujours choisi des clubs avec des possibilités de développement. »
Bougeant, qui découvre la Proligue, remarque après ses analyses qu’il débarque dans un championnat certes dense, mais « avec tout le monde qui joue un peu de la même manière aussi. Le profil des joueurs, la façon de jouer, il y a beaucoup de similitudes entre toutes les équipes. » Dès lors, son objectif avec les Mauves est d’essayer de se démarquer des autres équipes : « Je pense qu’il y a un chemin pour avoir des résultats qui est d’avancer différent, de prendre les choses un peu à contre-courant. » Si tout fonctionne comme il l’espère, Cherbourg pourrait bien faire à nouveau partie des troubles-fêtes de la saison.
Néanmoins, il reste encore bien difficile de faire un pronostic pour imaginer un classement final avec les forces en place. D’autant que derrière, si Strasbourg semble s’être donné les moyens d’accrocher un maintien confortable, les deux derniers de la saison dernière Valence et Besançon ainsi que les deux promus Sarrebourg et Angers ne semblent pas, sur le papier, si éloignés que ça des autres clubs. Concernant le club valentinois, Eric Forets estime que le recrutement estival « a porté ses fruits, les joueurs qu’on a choisi ont été très bien intégrés. On a réussi à faire une préparation et à préparer l’équipe pour ce niveau. » Et concernant la constitution du tableau final, il ajoute que « chaque année, il y a un accident industriel en bas et en haut souvent une très grosse surprise. Et cette année, avec tout ce qui se passe, ça dérogera encore moins à la règle : il y aura forcément une surprise dans les six premiers, et forcément en bas du tableau une équipe qui s’est complètement raté et qui au départ mériterait sûrement mieux. » D’autant que cette année, avec les conditions sanitaires particulières, « on ne maîtrise pas tout », conclut Benjamin Braux. L’aléatoire pourrait en effet jouer un rôle non négligeable dans une saison qui s’annonce très particulière.
* Chiffres de la LNH au 4 août 2020Mickaël Georgeault