Pays-Bas
M. Mayonnade : "Le titre de champion du monde restera un grand moment"
La fédération néerlandaise a officialisé la nouvelle ce midi. Le Français Emmanuel Mayonnade, qui avait pris les rênes de la sélection féminine en 2019, ne poursuivra pas l'aventure. Celui qui entraine également le Metz Handball au quotidien revient pour nous sur cette décision.
Manu, pouvez-vous nous expliquer un peu plus votre décision ?
- On ne me proposait que de continuer pour les quatre prochains mois, soit jusqu'après le prochain championnat du monde. J'avais dans l'idée de prolonger un peu plus loin, peut-être jusqu'aux prochains Jeux Olympiques, si on arrivait à s'y qualifier. Je pense que ce n'était pas très pertinent de repartir pour seulement quatre mois, puisqu'il était probable que l'aventure n'aille pas au-delà.
Y'avait-il un peu de fatigue de votre part à enchainer les compétitions de clubs et nationales ?
- Non, pas vraiment. J'ai toujours eu le sentiment de ne pas délaisser Metz pour les Pays-Bas, et inversement. J'ai pu compter sur un staff très solide à Metz pour s'occuper des moments où j'étais absent. Et le déroulé de nos semaines me permettait de gagner du temps, quand je préparais les matchs contre Dortmund en Champions League, j'avais l'occasion de voir un certain nombre des internationales, pareil pour Esbjerg ou d'autres clubs en Champions League. Je n'ai jamais perdu le fil des deux entités, pareil à Metz, je savais quelle séance avait été faite quand j'étais en stage avec la sélection.
Que vous a apporté cette expérience avec la sélection ?
- En tant qu'homme, j'ai vécu une aventure extraordinaire, avec des filles géniales. J'ai croisé des gens géniaux. Quand tu passes du temps avec une personne de la dimension d'Estavana Polman, ça te transforme la vie. Mais ce n'est pas la seule, Tess Wester, Lois Abbingh...Il y a toujours eu une forme d'humilité entre nous, on ne vient pas de la même culture, on a du mettre un peu d’eau dans notre vin, elles comme moi. Je me souviens, pendant notre premier stage, en mars 2019, on avait décidé de beaucoup s'entrainer, et on est venu me dire que ce n'était pas comme ça que les stages se passaient d'habitude. Je leur ai dit que si j'étais là, c'était justement pour casser un peu ces habitudes. On a réussi à tous modifier un peu notre façon de fonctionner.
- Au bout de deux ans et demi de collaboration, avez-vous l'impression que celle-ci a apporté à Metz Handball ?
- Il faudrait sans doute plus en parler à mon président, mais je le sens bien sur plein de détails. Il n'y a pas une paire d'arbitres en Champions League que je n'ai pas croisée avec la sélection, par exemple. C'est forcément une plus-value dans les échanges. J'ai vu encore plus de matchs, analysé les choses un peu différemment, je me suis retrouvé dans des situations que je n'avais pas connues, tout ce surplus d'expérience est forcément bon pour moi et donc pour le club.
"On me pourra pas m'enlever cette médaille"
- Le titre de champion du monde en 2019 reste-t-il un des sommets de votre collaboration avec la sélection ?
- Bien sûr, surtout qu'il est arrivé au bout de quelques mois. J'ai plein d'anecdotes sur cette compétition, je me souviens du soir de notre défaite contre la Slovénie. Je suis dans la salle vidéo en train de préparer le prochain match, et Estavana Polman passe sa tête et me dit de ne pas me prendre le chou, que les filles n'avaient pas mis beaucoup d'énergie et que ça allait bien se passer par la suite. Je n'attends pas forcément quoi que ce soit de mes joueuses, mais ça m'a regonflé et je me dit que ce moment a peut-être, un tout petit peu, conditionné la suite.
- Vous faisiez récemment le parallèle avec la coupe de France remportée avec Mios...
- Je me rappelle qu'après ce premier trophée avec Mios, je me suis dit : je ne sais pas ce qui m'attend après, mais je pourrais au moins dire que j'ai gagné la coupe de France. Il se trouve que j'en ai gagné plusieurs après, mais après ce titre de champion du monde, je me suis fait la même réflexion. Personne me peut dire ce qui va advenir par la suite, mais on ne pourrait pas m'enlever cette médaille.
- Vous sortez au final par la petite porte, sur une correction passée par la France en quarts de finale des Jeux. Qu'est-ce que vous aimeriez changer à cette fin ?
- C'est comme ça, ça ne sert à rien d'avoir des regrets. J'en ai discuté avec ma capitaine qui me disait que c'était triste pour nous, en tant que sélection, parce qu'on avait l'impression de faire une super préparation depuis début juin, et on rate vingt minutes, les vingt minutes les plus importantes des Jeux Olympiques...Si on n'avait pas joué la France, qui a gagné le titre par la suite, ça aurait peut-être changé la donne, mais au final, c'est l'histoire, c'est comme ça.
- Reprendre une sélection dans le futur, c'est quelque chose qui vous tente ?
- Oui je pense, après, je n'ai aucune idée de quoi ou de quand. Je ne suis pas le genre de personnes qui a plein de rêve, je me laisse un peu porter par le truc. C'est sûr que maintenant que j'ai fait les Jeux, même sans public, je me rends compte à quel point c'est incroyable. Toutes les compétitions que j'ai vécues l'ont été. Le seul souci pour moi, c'est que je suis encore jeune, et que je ressens encore le besoin de coacher au quotidien. Des gens comme Olivier Krumbholz, Guillaume Gille ou Thorir Hergeirsson ont réussi à être champion olympique sans avoir entrainé en club depuis longtemps, et c'est quelque chose que je ne pourrais pas faire. J'ai besoin de sentir les joueuses, d'avoir des réflexes, pour poser le temps-mort au bon moment... Je pense ne pas avoir assez d'expérience pour ne m'occuper que d'une sélection. Mais évidemment que quand on a connu une telle expérience, on a envie d’y replonger un jour ou l’autre.
Propos recueillis par Kevin Domas