Série US
A la découverte du handball américain
Si les Etats-Unis dominent le sport mondial aux Jeux Olympiques et dans la plupart des grandes compétitions internationales, le handball reste encore confidentiel au pays de l’Oncle Sam. Comment le jeu à sept s’est-il développé de l’autre côté de l’Atlantique depuis la Coupe de la Ligue 2009 à Miami ? Le hand peut-il devenir à moyen terme un sport important en Amérique ? Handnews a voulu en savoir plus auprès de ceux qui font bouger le handball aux USA.
« Donc il a encaissé 20 buts ? Dans son sport, c’est une grande performance ! » En janvier dernier, en plein Mondial qatari, un journaliste du New York Times parlait ainsi de Thierry Omeyer. En découvrant le handball, il s’étonnait de constater que la référence mondiale au poste de gardien de but pouvait encaisser plus de 20 buts par match. Le journaliste faisait alors découvrir aux lecteurs un sport qui « draine souvent plus de fans que le basket en Europe », une surprise pour les américains. Comment expliquer le handball simplement à ses compatriotes ? Le journaliste du New York Times s’était essayé au jeu. « Le hand est rapide, avec des changements continuels comme au basket ; des buts, des filets et un positionnement comme au soccer ; et une esthétique qui rappelle le dodgeball. Les joueurs avancent en se passant la balle et ne faisant pas plus de trois pas. Leur but est de lancer la balle dans le but adverse, en battant le gardien qui, dans l'une des positions les plus énigmatiques et digne de Sisyphe dans le sport, peut encaisser 30 buts et pensé avoir réalisé un bon match. » En lisant ces quelques lignes, le chemin semble encore long pour faire du jeu à sept l’un des sports reconnus aux Etats-Unis.
50 clubs seulement sur tout le territoire
« La situation du handball aux US n’a rien à voir avec celle en Europe. Ici, le hand n’est pas un sport très connu. Il faut sans cesse expliquer qu’il ne s’agit pas de pelote basque », confie à Handnews Javier Garcia Cuesta, le sélectionneur espagnol à la tête de l’équipe masculine. Le nombre de pratiquants est toujours très restreint. Peu de données filtrent de la part des dirigeants américains sur le sujet. En 2008, un chiffre de 5.000 licenciés avait été communiqué. Dans un pays de près de 320 millions d’habitants, il s’agit d’une minuscule goutte d’eau. « Difficile d’estimer le nombre de personnes qui jouent au handball », confirme Michael D. Cavanaugh, CEO de la fédération américaine depuis un an et demi.
Pourtant, plusieurs clubs ont vu le jour ces dernières années et tentent de démocratiser le hand au pays du basket et du foot américain. « Il y a des clubs dans la plupart des Etats : New-York, Chicago, Los Angeles, Denver ou encore Boston, explique Javier Garcia Cuesta. En général, ils sont constitués par un groupe d’amis qui se retrouvent autour du sport. Ils louent une salle et s’y entraînent une à trois fois par semaine. » Il existerait une cinquantaine de clubs dispersés sur tout le territoire. Le handball commence son aventure américaine dans les grosses villes, auprès d’un public urbain. New-York, Los Angeles, Chicago, Boston, San Francisco et Atlanta ont tous leur équipe. « Les plus gros clubs américains ont parmi leurs joueurs des personnes qui ont grandi en Europe en pratiquant différents sports, dont le handball » poursuit Michael D. Cavanaugh.
Un championnat organisé … sur un week-end !
Le handball est encore à l’ère préhistorique aux Etats-Unis. Aucun joueur professionnel ne compose donc la cinquantaine de clubs en activité. « Ils travaillent tous à côté ou réalisent leurs études en parallèle, reconnaît Javier Garcia Cuesta. La plupart s’entraîne tôt le matin ou en soirée. Les seuls professionnels dans le handball aux Etats-Unis sont le secrétaire général qui dirige le bureau à Colorado Springs ainsi que les deux entraîneurs des équipes nationales. »
Un championnat national est organisé chaque année. En 2015, un record d’équipes engagées a été battu, mais les chiffres restent très modestes : 10 formations pour l’élite masculine, 17 pour la compétition masculine hors élite et 8 pour les femmes. « Ce n’est pas un championnat comme on en trouve en Europe, tient à relativiser le sélectionneur espagnol. Il se déroule uniquement sur un week-end. » Difficile dans ces conditions de proposer un niveau de jeu élevé et de fidéliser le public autour de la petite balle pégueuse. Plusieurs initiatives existent dans différentes villes, notamment avec un tournoi de beach handball organisé pendant deux jours fin août à Los Angeles. La cible est avant tout le jeune public et les personnes qui n’iraient pas spontanément s’inscrire dans un club. Pour 10 dollars, chacun est libre de découvrir le beach handball. Cela reste cependant une initiative isolée, avec peu de médiatisation, pour ne pas dire aucune. Le handball semble cantonné à l’arrière-boutique du sport américain. Est-ce une fatalité ? Ou existe-t-il un réel potentiel pour installer le hand sur le devant de la scène ?
Découvrez demain dans la 2ème partie de notre immersion au sein du handball US quels sont les moyens mis en œuvre pour faire bouger les lignes au pays du « sport entertainment ».
Olivier Poignard