EdF (M)
Ludovic Fabregas sur sa lancée
Sans surprise aucune, Ludovic Fabregas fait partie des trois pivots emmenés par Didier Dinart en vue du championnat du monde, que l'équipe de France entame ce soir face au Brésil. A seulement 22 ans, le Barcelonais fait déjà partie des meilleurs au monde sur son poste. Mais où s'arrêtera-t-il ?
« S’il continue comme ça, je lui vois bien un destin à la Titi Omeyer. Il va amener le standard sur son poste à des niveaux qui n’auront pas eu d’égal auparavant et il faudra attendre longtemps avant qu’il y en ait un autre. » L’hommage, appuyé, vient pourtant d’un ancien pivot bleu réputé taiseux, en l’occurence Bertrand Gille. A 22 ans, Ludovic Fabregas renverse tout sur son passage. Champions League, champion du monde et vice-champion olympique, son palmarès parle déjà pour lui. S’il est toujours aussi timide derrière sa grande silhouette, il ne laisse personne indifférent. Parti de Montpellier cet été, ses supporters ont cru, un moment, que le phénomène allait stagner, régresser peut-être, en quittant la France. Il n’en a rien été. En Catalogne, il a fait l’effet d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, renversant tout sur son passage. Au point de prendre le titre de pivot numéro un en trois mois. « J’avais besoin de connaitre autre chose. A Barcelone, j’apprends beaucoup au quotidien, à travers une nouvelle culture » avance-t-il.
"Du jamais-vu"
Barcelone, c’était un choix sportif, mais aussi de famille. Lui ne s’imaginait pas quitter l’Hérault pour aller autre part. Histoire de boucler la boucle familiale. Sa grand-mère, originaire de Figueres, insiste pour qu'il parle le catalan aussi bien que l'espagnol. D’ailleurs, elle était là, avec le reste de la famille, pour la première sortie de son petit-fils au mois d’aout. Un moment qui restera dans les annales du clan Fabregas. « Entendre l’hymne du Barça que tu as écouté maintes et maintes fois quand tu étais petit, c’est spécial. La présentation, avant cela, avec toute la presse, était impressionnante. C’était du jamais-vu pour moi » se souvient Fabregas. Qui aurait pu, comme certains avant lui, tomber dans la joie béate, les yeux grands ouverts à l’idée de vivre un rêve et de porter un maillot aussi mythique. Il n’en a rien été. « Il faut faire abstraction du fait qu’on a tous une chance énorme de jouer pour Barcelone. Je suis dans la phase où j’ai envie de prouver que je peux réussir à Barcelone et que cette chance, elle était bien pour moi, pas pour un autre » continue le pivot.
Cédric Sorhaindo, le "grand frère"
Pour se fondre dans son nouveau cadre, il ne lui a fallu que quelques jours. Forcément, l’adaptation allait être facilitée par le contingent français déjà en place et par le fait que, même parmi les étrangers, certains parlent couramment la langue de Molière. Mais, comme en équipe de France, quand il a débarqué sur la pointe des pieds en 2016, c’est l’ancien qui l’a pris par la main. Cédric Sorhaindo ne lui a sans doute pas montré comment prendre son vélo le matin pour aller à l’entrainement, mais c’est un détail car, entre les deux hommes, l’entente est bien plus que cordiale. « C’est une grande histoire entre nous. J’étais le premier Français à arriver à Barcelone et j’aurais aimé avoir des gens avec qui partager des moments hors du terrain. J’essaye d’être cette personne pour Ludo, mais aussi pour les autres joueurs français » explique le pourtant pudique capitaine des experts.
Allégeance aux anciens
Ludovic Fabregas, quant à lui, est un peu plus disert sur le sujet . Même s’il faut le relancer pour en savoir un peu plus. « On s’entend sur tout et j’échange beaucoup avec Cédric, même sur nos vies personnelles. Il m’apporte beaucoup de choses positives, en termes de conseil et d’attitude. C’est une relation un peu familiale qui est basée sur la confiance » décrit celui qui va, à assez court terme, devenir un des dépositaires de cet « Esprit Bleu ». Quand on a 22 ans, on n’est pas forcément celui qui va parler le plus fort dans le vestiaire ou aller chercher des noises aux arbitres sur le terrain. Mais, en revanche, on peut faire allégeance aux anciens, boire les conseils et les appliquer. Didier Dinart l’a bien compris, répétant à l’envi que son protégé possède un « état d’esprit exemplaire. » Et Fabregas suit ce chemin, fait d’humilité et de simplicité. « Pour moi, que ce soit Montpellier, Barcelone ou l’équipe de France, ce sont des maillots qui se respectent énormément. Qu’on doit mouiller quand on les porte. Avec ces couleurs sur le dos, tu ne peux pas passer au travers, tu dois avoir un niveau d’exigence au maximum envers toi-même » appuie-t-il.
"Les capacités pour marquer la compétition"
Ainsi va Ludovic Fabregas, toujours aussi discret, mais toujours aussi respectueux de l’ordre établi. Et alors que la concurrence est toujours aussi forte sur son poste en équipe de France, nul doute que Didier Dinart n’a pas attendu longtemps avant de coucher son nom sur la liste des partants pour Berlin. Et, trois ans après sa première compétition, l’Allemagne pourrait être le lieu parfait pour qu’il marque de son empreinte une grande compétition internationale. « Il en a les capacités mais s’il ne le faisait pas, on ne pourrait pas lui en vouloir. Il ne fait pas oublier qu’il est jeune et que, comme Dika, ces gamins surdoués pourraient arriver à un plateau un jour, en terme de progression. Pour l’instant, il est le pivot le plus complet au monde, mais pas encore le meilleur partout. Mais, à mon avis, ce n’est qu’une question de temps. » Bertrand Gille continue dans le laudatif. Décidément, ce grand bonhomme ne laisse personne indifférent.
A Berlin, Kevin Domas