Mondial Jeune (U19)
"Un miracle permanent"
À l'occasion de la rencontre France-Hongrie, remake de la finale de l'euro 2014 remportée aisément par les bleus (30-22), rendez-vous a été pris avec le sélectionneur Eric Quintin. Au menu, le mondial jeune (U19) qui arrive rapidement mais aussi l'état des troupes, l'invitation de Denis Lathoud, et les problématiques de formation pour une équipe qui en sait déjà beaucoup.
Il est 16h30 à l'hôtel de l'équipe de France Jeune, situé dans le cadre pittoresque des montagnes de la Tarentaise. Alors que les joueurs partent se préparer pour le match, sur le pas de la porte se trouve Eric Quintin qui veille à ce que tout fonctionne. Très détendu, il prévient qu'il doit s'absenter juste deux minutes. Deux minutes d'attente, soit le temps de commander et de se faire servir un jus de fruit et un café, avant le début d'un long entretien avec le sélectionneur des U19, morceaux choisis.
La préparation.
« On a repris le groupe la semaine dernière à Saint-Malo, les jeunes sont exemplaires car on est dans une situation compliquée. Pour donner une idée, là où on a deux semaines de préparation, les équipe professionnelles en font six. L'objectif est donc de remettre tout le monde en marche sans en faire trop tout de suite, c'est un équilibre entre un besoin de performance imminent et le risque d'aller trop vite. » « Aucune blessure sérieuse, après des petits bobos de reprises, des petites tendinites, des petites inflammations.. Mais on a une cellule médicale remarquable qui s'occupe de façon vraiment parfaite et performante. Pour l'instant tout va bien. » [Ndla : Lors de la victoire 30-22 contre la Hongrie après l'entretien, Aymeric Minne est sorti sur une inquiétante blessure. À suivre.]
L'absence de Julien Meyer et de Florian Billant.
« C'est pas un souci. On a, j'espère, suffisamment assimilé que la priorité c'est la formation des jeunes. C'est vraiment eux qui sont au centre comme on le répète trop souvent... Bien qu'on le pense. Le fait que Julien Meyer soit monté c'était pour avoir un niveau d'adversité plus haut, nécessaire à sa progression, sous le regard expert de « Doudou » (Daouda Karaboué). Pour ce qui est de « Flo » (Florian Billant), il y avait tellement de bons ailiers droit avec Benoît Kounkoud et Yannis Lenne, que pour que les trois aient un temps de jeu équivalent, on a fait le choix qu'il monte avec les juniors. » « Il n'y a aucune angoisse particulière par rapport au fait qu'ils ne soient pas avec nous. On est vraiment dans une démarche, comment dire... [Pause puis changement de ton] C'est tellement incroyable de travailler avec ces garçons, aussi bien en terme d'émotion que de technique, reprendre sans avoir beaucoup travaillé cette année... Parfois je me dis que je ne sers à rien. De temps en temps on resserre un peu les boulons, j'ai vraiment parfois l'impression qu'on est des gardes-fou mais pas beaucoup plus. »
Son rôle avec ses joueurs.
«La seule chose qu'on leur dit très clairement, c'est de prendre conscience du parcours qui a été le nôtre. Je sais que je suis un privilégié car j'ai vécu des choses qui ont trait à l'explosion du hand français, du passage de l'amateur au monde professionnel. J'ai vécu cette période sans en être conscient. Tout ce que je leur dis c'est que quand on demande plus d'exigence, on essaie de faire que l'exigence leur soit propre, leur soit durable et maximale. J'ai la seule revendication de dire : "voilà, on n'a pas bien compris ce qui se passait à une certaine époque, tout ce qu'on souhaite vous transmettre c'est que vous soyez plus pertinent qu'on ne l'a été". » « On garantit aussi la vie de groupe. Qu'il y ait une ligne dans l'équipe, qui concerne tout le monde : joueurs, médicaux, délégation... On est là pour tenir une ligne sociale, que chacun se sente bien dans le groupe. À cet âge là, il faut de temps en temps juste cadrer. Sincèrement, voilà la seule chose qu'on peu mettre en lumière sur ce qu'on apporte. Je sais, c'est pas le plus excitant ! [rire] ».
Les barjots et les experts présents.
« [Silence]. Il y a d'évidence une sensibilité d'avoir vécu des expériences bonnes ou mauvaises qui fait que quand tu es au plus haut de l'intensité des confrontations, tu apprends des choses, à gérer ces moments où on te demande le meilleur face à l'adversaire le plus redoutable. Tu apprends donc des choses qui sortent de l'ordinaire. » « Denis (Lathoud) c'est un pote. […] Je sais à quel point il était un joueur fantastique avec des compétences d'arrière tout à fait singulières. L'autre élément c'est qu'il a été un acteur important en terme de management d'équipe, quand il a su nous faire prendre conscience qu'on pouvait être champion du monde. C'est un plaisir qu'il soit avec nous. » « Je dis souvent aux joueurs qu'ils seront confrontés tout au long de leur carrière à des entraîneurs de sensibilités différentes, à eux de prendre chez chacun pour créer leur propre vision des bonnes choses. J'ai l'impétuosité de croire que c'est un des atouts du handball français, de savoir prendre le meilleur de tout. Amener Denis Lathoud, c'est amener une expérience. » « Denis, il peut refaire le coup de Reykjavik. Tant qu'il ne les amène pas au bar cette fois ! [fou rire] »
Champion d'Europe... Champion du Monde ?
« C'est l'objectif des minots avant tout. C'est le nôtre aussi car on sait bien que le handball européen est le plus pointu de la planète, même si on voit que sur le mondial junior les Égyptiens ont sorti la Suède qui était une sacrée équipe. » « Ils nous ont offert quelque chose d'incroyable l'année dernière, je veux qu'ils continuent sur le même principe de prendre les matches les uns après les autres, comprendre que ça commence par un combat : celui contre soi-même. » « Tout les adversaires sont respectables. On se rappelle que l'année dernière on a fait que match nul contre l'Allemagne "un peu" à l'arrache et qu'on ne gagne l'Espagne que d'un but avec une partie extraordinaire de Julien (Meyer). Le principal adversaire, c'est nous. Ce que nous ne saurions pas nous-même faire, ou ne pas prendre du meilleur de nous-même. C'est la seule chose qui m'intéresse. Qui nous intéresse. » « Ces matches là vont probablement définitivement terminer la liste. C'est le but car on doit rendre la liste de 18 samedi. « Doudou » est chargé de dégager trois gardiens des quatre en concurrence (Medhi Harbaoui, Clément Gaudin, Nicolas Gauthier, Florent Bonneau). « Doudou » a la difficile mission de choisir car il a quatre gardiens qui prennent très bien le relais de Julien. Sur le champ, il y aura sûrement un pivot et un arrière qui sortiront. Mais je sais pas encore exactement. Le noyau sera quand même celui du championnat d'Europe de l'année dernière. »
La réussite des catégories jeunes des équipes de France
« La volonté de faire des résultats a toujours été présente. Je pense qu'il y a aussi un chemin qui mène à la confiance, et chez les cadres, et chez les joueurs. Ce chemin, c'est du boulot, tout les ans retourner au charbon... Johann (Delattre, sélectionneur junior) a su amener cette exigence, il a réussi à avoir ces détails qui mène une équipe à la volonté unique de gagner. » « Je pense que ce qui est singulier en France, c'est notre diversité de culture avec le travail de la fédération pour avoir un point d'ancrage partout dans la région pour repérer des joueurs. […] Les garçons qu'on a actuellement sont le fruit d'un mélange et d'un héritage. Aujourd'hui, les entraîneurs des autres pays sont très curieux de savoir ce qui se passe en France pour que ça soit aussi remarquable. Après je reste humble, ça ressemble aussi à un miracle permanent. »
À propos du soutien reçu après les difficultés de transfert du pôle de Provence vers Aix-en-Provence, Eric Quintin avait un message particulier :
"Les joueurs sont à Aix et seront dans le lycée choisi à la rentrée. C'est réglé et merci à la famille du handball car elle a beaucoup pesé et nous a aidé pour régler ce problème."