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Yanis Lenne, l'âge de stabilité
Arrivé en équipe de France par la petite porte en 2017, Yanis Lenne y a fait son retour par la grande il y a deux ans. Et a désormais acquis la stabilité nécessaire pour ne plus en partir.
A tutoyer le soleil trop tôt, on peut se brûler les ailes. Icare l'a appris à ses dépens, mais la mésaventure aurait, également pu arriver à Yanis Lenne. Quand le gaucher de Colmar fait ses débuts en bleu, il a à peine vingt ans et une poignée de matchs dans l'élite comme expérience. Peu importe, Didier Dinart voit alors en lui un joueur plein d'avenir, donc les capacités défensives peuvent servir les desseins de l'équipe de France. Et peu importe si, en club, Christian Gaudin le balade de l'aile à l'arrière et inversement. En bleu, c'est à l'aile que son avenir se dessine. "Avec le recul, je pense que c'était une bonne idée, Didier fonctionnait pas mal comme ça à l'époque. Trouver sa place en équipe de France, s'intégrer, cela prend du temps" concède-t-il maintenant.
Un des dépositaires du jeu dans son club
Si, au championnat du monde, il ne rentre pas sur le terrain, la comète est sur la rampe de lancement. Quelques mois plus tard, il file au FC Barcelone. Mais entre temps de jeu réduit et concurrence accrue, l'Alsacien ne trouvera jamais vraiment sa place en Catalogne. Au point de regretter d'être parti à l'aventure si tôt ? "Jamais je ne regretterai tellement j'ai appris, sur le terrain et en tant que personne. Tous les jours, j'ai vu ce qu'est le professionnalisme de très près, ça a été un plus énorme" se souvient-il encore. Auprès des meilleurs joueurs du monde, il ronge son frein tout en emmagasinant de l'expérience. Une expérience qu'il mettra à profit à Montpellier, deux ans plus tard. Dès son retour, il se rend indispensable, au point que, cette saison, le MHB ne compte qu'un seul ailier droit de métier dans son effectif. Et il devient un des dépositaires du jeu montpelliérain. "Quand ça va pas, certaines équipes shootent à douze mètres en désespoir de cause. Nous, on donne le ballon à Yanis, et avec 50 centimètres d'angle, il est capable de mettre des shoots monstrueux. J'en ai vu un paquet, mais c'est certainement le meilleur ailier avec qui j'ai joué en club" loue Valentin Porte.
"Beaucoup de mal à accepter l'idée que je pouvais moi aussi être bon"
Cette plénitude dans le jeu, l'Alsacien la puise dans sa stabilité émotionnelle. Lui même reconnait qu'il n'y a pas si longtemps, il était "un peu foufou, à bouger dans tous les sens. Désormais, je me pose un peu plus, histoire de récupérer." Cette dépense d'énergie n'arrête pas de surprendre jusqu'à ses coéquipiers. "Je l'engueule parce que même avant les matchs où il va jouer 55 minutes, il est à fond à l'entrainement" sourit encore Porte. Mentalement, Yanis Lenne confesse avoir progressé. Et il n'hésite pas à parler de sa préparation mentale, pour laquelle il travaille avec un spécialiste. Histoire de prendre conscience de son plein potentiel et de ne pas complexer, alors qu'il en arrive maintenant à tutoyer le sommet de la hiérarchie mondiale sur son poste. "J’ai commencé à me concentrer il y a un an et demi sur la préparation mentale afin de mieux appréhender les situations auxquelles je pouvais être confronté sur le terrain. Comment se comporter dans les temps faibles ? Les temps forts ? [...] Je me sens beaucoup plus posé, apaisé. J’avais beaucoup de mal à accepter l’idée que je pouvais moi aussi être bon, du mal à le dire. Alors que ça aide pourtant…" explique-t-il sur le site de la FFHB.
En première classe dans le train bleu
"Travailleur" et "super gars", ce sont les deux qualificatifs qui reviennent le plus souvent quand on aborde le sujet de Yanis Lenne. Sa bonhommie et son travail font l'unanimité au sein de la maison bleu. "C'est un mec qui fait un bien fou dans un groupe. Sa joie de vivre, son enthousiasme, c'est vraiment quelqu'un qui m'impressionne" continue Porte. Volontiers chambreur, Yanis a désormais acquis une forme de maturité. Il y a un an et demi, il disait encore ne pas vouloir laisser passer le train bleu. La place de Luc Abalo, parti à la retraite, lui paraissait promise. Restait à concrétiser sur le terrain. Force est de constater qu'à la suite d'un championnat d'Europe réussi, il possède désormais son siège en première classe. "Il fait partie des gens qui comptent, de par leurs performances. Il a trouvé une forme de stabilité en étant toujours à la limite de ce qu'il peut donner, avec un investissement sans faille" termine Guillaume Gille. S'il aurait pu chuter aussi vite qu'il est monté au sommet, à la différence d'Icare, Yanis Lenne a pris envol. Et ne semble pas prêt de retomber.
A Katowice, Kevin Domas