IHF
La continuité d’un système contesté, Hassan Moustafa reconduit, Philippe Bana s’y associe

Réunis depuis vendredi au Caire en Egypte, les délégués des fédérations nationales ont fait un choix clair : la continuité. En étant réélu président de la Fédération internationale de handball, Hassan Moustafa prolonge un règne entamé en… 2000. Vingt-cinq ans plus tard, malgré une contestation plus forte que jamais, le même système de gouvernance reste en place, inchangé dans ses fondements et ses équilibres politiques dans un manque de transparence total.
À 81 ans, l’Égyptien Hassan Moustafa briguait un septième mandat. Pour la première fois depuis plusieurs cycles, il faisait face à une opposition structurée, incarnée par trois candidats européens : Gerd Butzeck (Allemagne), Franjo Bobinac (Slovénie) et Tjark de Lange (Pays-Bas). Tous dénonçaient, à des degrés divers, les dérives d’une IHF accusée d’immobilisme, de manque de transparence, et d’un fonctionnement clientéliste reposant sur des équilibres politiques plus que sur une vision sportive globale.
Jamais Hassan Moustafa n’aura été aussi critiqué. Sa longévité exceptionnelle s’est accompagnée, au fil des années, de multiples scandales, de soupçons récurrents et d’une gouvernance régulièrement pointée du doigt pour son autoritarisme et son opacité. Si aucune condamnation judiciaire n’est venue mettre un terme à son parcours, la défiance d’une partie du handball mondial, notamment européen, n’a jamais été aussi palpable. Au dela des 3 fédérations des 3 autres candidats (Allemagne, Slovénie et Pays-Bas), la seule "grande" nation ayant voté contre Moustafa est la Norvège et sa nouvelle présidente. Le Danemark, par exemple, n'a pas exprimé à haute voix le choix de son vote. A contrario, la France et l'Espagne ont soutenu Moustafa car présents dans son comité exécutif.
Hassan Moustafa réélu avec 73,3% des voix
Pourtant, fidèle à une mécanique bien huilée, le président sortant a pu compter sur le soutien massif des petites fédérations, en particulier africaines, bénéficiaires de programmes de développement financés par l’IHF depuis deux décennies. Le président sortant a décroché 73,3% des votes déclarés (129 sur 176). Un système de dépendance assumé par ses détracteurs, mais qui continue de faire la différence dans les urnes. En amont du vote, plusieurs représentants des fédérations présentes ont mis en avant des soucis techniques, plusieurs fédérations n'arrivant pas à se connecter et entraînant un retard de l'élection de plusieurs heures. Un événement qui ne pourra pas empêcher la suspicion. Pour rappel, seulement 176 fédérations étaient présentes sur les 210 affiliées à l'IHF. Comme l'a rappelé le candidat slovène Gerd Butzeck "Le handball mondial mérite mieux. Nous avons besoin d'une plus grande visibilité et de plus de sponsors. Si nous n'agissons pas dès maintenant, le handball va perdre son statut de sport olympique et son influence dans de nombreuses régions du monde".
Dans ce contexte, l’élection de Philippe Bana, président de la FFHB, au poste de premier vice-président pose question. Le président de la Fédération française de handball, autrefois très critique envers une IHF qu’il qualifiait de « Fédération internationale du Moyen-Âge », s’inscrit désormais pleinement dans ce système. En soutenant ouvertement Hassan Moustafa, Bana valide de facto une gouvernance qu’il dénonçait hier encore.
Philippe Bana remplace Joel Deplanque au poste de 1er vice-président
D’un point de vue strictement politique, cette élection renforce l’influence française. Mais sur le plan symbolique, elle laisse un goût amer. Le handball français, souvent présenté comme moteur du renouveau sportif mondial, se retrouve associé à un modèle contesté, fondé sur la longévité, les réseaux et le clientélisme plus que sur la réforme. Et ce n'est pas en annonçant une transformation digitale de l'IHF que les choses vont bouger. Tous les observateurs du monde du handball connaissent déjà la suite de l'histoire, une histoire bien pathétique et peu glorieuse...très loin des fameuses "valeurs du sport" !
Alors que les statuts prévoient que le premier vice-président puisse assurer l’intérim en cas de vacance du pouvoir, Philippe Bana devient un acteur central du futur de l’IHF compte tenu de l'âge de Moustafa et son état de forme, pourra t-il continuer à diriger l'institution jusqu'aux JO de Los Angeles ? Le président de la FFHB est donc en embuscade déclarée pour enchaîner après la fin de son mandat à la tête de la FFHB.