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Où en sont les chantiers de l'équipe de France ?
Intronisé en janvier dernier, le nouveau sélectionneur de l’équipe de France Guillaume Gille a ouvert de nombreux chantiers dans le jeu de l’équipe de France. Décryptage avec Jérôme Fernandez, ancien capitaine de l’équipe de France.
Le jeu d'attaque
Grandes sont les ambitions du nouveau sélectionneur et de son staff pour le jeu offensif de l’équipe de France, qui était apparu particulièrement délité lors du dernier championnat d’Europe. Mais les défis sont nombreux, d’autant plus que Nikola Karabatic, une des pièces maitresses du jeu des bleus, est forfait pour le prochain championnat. “Nous avons une multitude d’options à décliner” appuie Guillaume Gille quand il parle de l'attaque de la sélection nationale. Pour l’instant, tout semble pourtant encore bien tatonnant. “Je n’ai rien remarqué de révolutionnaire en termes d’enclenchements mais on manque d’énormément de justesse sur la base arrière, notamment dans les timings et les prises d’intervalle. Ce qui se traduit par un certain nombre de prises de balle lors des deux matchs face à la Serbie” souligne Jérôme Fernandez.
A gauche, Guillaume Gille a fait un de ses rares choix forts en mettant Timothey N’Guessan dans un fauteuil tout en donnant les clés du camion à Kentin Mahé à la mène. Les deux matchs contre la Serbie sont, en tout cas, venus confirmer que le nouveau sélectionneur n’a pas encore déterminé de hiérarchie parmi les gauchers, puisque Valentin Porte, Dika Mem et Nédim Rémili ont tous les trois eu un temps de jeu conséquent sur la base arrière. “Il y a beaucoup de choix pour le sélectionneur, mais on sent quand même qu’un sept de départ se dégage, avec Valentin Porte aligné en début de rencontre. Malheureusement, il n’a pas forcément réussi à faire forte impression” note tout de même Jérôme Fernandez. Sur les ailes, si Luc Abalo a démontré lors du match aller que sa sélection ne faisait pas tâche, à gauche en revanche, Hugo Descat semble être une véritable alternative crédible au capitaine Michaël Guigou.
Plusieurs membres du camp France ont, en tout cas, insisté sur le travail réalisé depuis le regroupement au mois de novembre, pour confirmer que le wagon était sur les bons rails. “Les consignes sont plus directives et détaillées, pas mal de choses ont changé. Quand on vient en vidéo, les consignes sont claires, le travail a été fait en amont, on n’avait pas toujours cette impression auparavant” illustre Kentin Mahé. Tout en concédant que, si le travail réalisé est de qualité, on n’en retrouve pas encore l’illustration sur le terrain.
Le jeu de transition
“On veut donner plus de vitesse au jeu. On a une équipe qui peut courir, et on veut qu’elle se projette vers l’avant plus fort qu’auparavant” explique Guillaume Gille. Lors des deux sorties face à la Serbie, la France n’a jamais été aussi forte que quand elle a appuyé sur le jeu de transition, une option qui n'était pas forcément plus utilisée que cela sous la direction de Didier Dinart. Chaque début de seconde période en a été la preuve, avec Nédim Rémili à la baguette au match aller et la paire Dika Mem/Melvyn Richardson à Créteil. “C’est clairement le point où il faut appuyer. On sent que les garçons sont en difficulté en attaque placée, alors autant mettre des buts faciles en montée de balle. Surtout que, pour la plupart, c’est un style de jeu déjà adopté dans leurs clubs, que ce soit à Paris ou à Barcelone” confirme Jérôme Fernandez. Attention tout de même à ne pas vouloir jouer plus vite que la musique, ce qui a parfois été un des soucis des bleus lors des deux rencontres de la semaine.
La défense
Le nouveau staff aura tenté bien des variations pendant les deux rencontres face à la Serbie, sans jamais sembler trouver une formule qui tienne la longueur. Adrien Dipanda, dans le groupe avec le statut de défenseur exclusif, n’a été utilisé qu’une mi-temps, et n’est pas apparu à son avantage à Zrenjanin, associé à Nicolas Tournat. La paire Ludovic Fabregas / Luka Karabatic a montré de belles choses par séquences, mais n'a pas trouvé la solution à l'équation serbe dans la durée. “Dans les intentions, j’ai trouvé la défense avec un peu trop d’envie, en allant chercher loin des joueurs qui n’ont pas forcément de gros bras” analyse Fernandez.
Qui note quand même qu'avec vingt-sept et vingt-six buts encaissés lors de ses deux sorties face à la Serbie, ce n’est clairement pas derrière que le bât blesse le plus pour les tricolores. Et, en Egypte, ils vont devoir y gagner des ballons pour se mettre à l’abri. “La défense, c’est plus une question de confiance, d'être sûr de ta force. On a parfois vu des attitudes un peu en dedans, mais, ce n’est pas pour moi, là où est le chantier le plus important” continue le meilleur buteur de l’équipe de France.
L'état d'esprit
Sérénité, positivité, autant de mots qui étaient dans les bouches des joueurs de l’équipe de France en début de préparation. Des choses qui leur avaient bien manqué à Trondheim l’hiver dernier et qui sont, avant même d’être sur le terrain, le terrain des grandes victoires. On aura du mal à accuser les bleus d’avoir lâché mentalement à Créteil, quand ils ont su remonter un débours de quatre buts pour s’offrir une balle de match. “On rame tous dans le même sens, on a une cohésion collective qui fait qu’on a été capable d’aller chercher un point. Et c’est important que tout se passe bien entre nous, car on va vivre en vase clos plus d’un mois” note le portier Vincent Gérard tandis que Kentin Mahé aimerait "qu'on montre un peu plus de hargne et d'envie, qu'on se dépasse un peu plus. On est encore trop gentil."
En observateur privilégié des deux rencontres de l’équipe de France la semaine passée, Jérôme Fernandez ne veut pas jeter le bébé avec l’eau du bain, et demande avant tout “de la patience et de la bienveillance avec cette équipe de France. Les chantiers ouverts, notamment sur le jeu placé en attaque, sont colossaux, mais, pour être passé par là avec Aix, je ne sais que trop bien que tout ceci demande du temps.” Du temps, c'est finalement ce qui manque le plus à Guillaume Gille et à ses troupes.
Kevin Domas