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Nemanja Ilic "J'aimerais finir ma carrière à Toulouse"
C'est en 2013 que l'ailier gauche serbe fait son apparition dans le championnat de France, rejoignant l'effectif d'un club en croissance, le FENIX Toulouse Handball. 10 ans après, le désormais meilleur buteur de l'histoire s'est inscrit parmi les figures du club occitan.
Les débuts en Serbie et le départ vers la France
C'est à l'âge de 8 ans que le natif de Belgrade découvre le handball grâce à un premier entrainement. Avec son frère, Vanja Ilic, les ailiers vont commencer leur jeune carrière au sein du Partizan Belgrade : "C'est moi qui ait commencé avant mon frère et depuis je suis resté. Mon frère est parti un peu au foot aussi, avant de revenir au Partizan". Rapidement intégré à l'équipe première, Nemanja Ilic découvre le monde professionnel et évolue rapidement en Ligue des Champions ainsi qu'en Challenge Cup, évoluant avec des joueurs comme Bogdan Radivojevic, également partenaire en sélection.
Après trois saisons au plus haut niveau serbe, le jeune ailier rêve plus grand et veut continuer de progresser. Alors, quand la France l'appelle , difficile de ne pas décrocher son téléphone : "Jouer au plus haut niveau, ça a été ma motivation principale mais aussi de voir l'Europe". C'est à l'aube de la saison 2013 que le droitier arrive à Toulouse, recommandé par un certain Daniel Andjelkovic : "C'est lui qui a parlé pour moi et qui m'a fait venir ici".
Une adaptation éclair garnie de frissons européens
Ayant tout juste soufflé ses vingt-troisièmes bougies avec sa famille, il a fallu faire ses valises et dire au revoir à tout ce dont on connaissait. Sans savoir un mot de français et arrivant sur la pointe des pieds, le jeune Nemanja Ilic découvre la vie en France et ses nouveaux partenaires d'entrainement : "Tout a changé, là-bas, j'étais chez moi, chez mes parents. Puis, je suis arrivé ici, sans parler la langue donc on a tout fait en anglais, puisqu'il y avait aussi beaucoup d'étrangers au club. A l'entrainement, ça allait vite puisqu'on répétait souvent les mêmes mots comme quand j'allais à la boulangerie (rires)".
Bien reçu et bien entouré, l'adaptation à ce nouvel environnement s'est faite à vitesse grand V. Une bonne chose pour l'ailier gauche, qui lui a aussi permis de rapidement s'illustrer sur les terrains, réalisant une belle première saison puisque finissant même dans le top 10 des buteurs (132 buts). Mais c'est surtout la cinquième place obtenue qui ravira le Serbe : "Elle a été parfaite ma première saison, on finit européen. On a pu jouer avec de grands noms, ce qui nous a permis de faire quelques matchs en Coupe d'Europe l'année d'après, même si on ne passe pas le second tour à cause de Melsungen (défaite 57-53 au cumul des deux matchs). C'était important pour le début de ma carrière en France que ma première saison se passe bien".
Et des grands joueurs, il y en a eu au FENIX Toulouse Handball. Des modèles à suivre qui apportent sur et hors des terrains, qui permettent d'avoir un cadre défini : "J'ai appris beaucoup avec eux. Déjà dans la vie quotidienne puis surtout à l'entrainement. On regarde comment ils vont, ça permet d'ouvrir son esprit". Si il y a bien un joueur qui a suivi le serbe toute sa carrière, c'est un autre serbe à savoir son entraineur actuel, Daniel Andjelkovic. Une relation parfaite sur et en-dehors des terrains, bien que l'entente ait évolué, passant d'une relation entre joueurs à une relation joueur-entraineur, tout comme cela a été le cas avec Rémi Calvel, lui aussi ancien demi-centre et adjoint du coach serbe.
Saisons après saisons, la même exigence
Si le natif de Belgrade s'est rapidement inscrit en figure de proue du club, il a aussi fait de même au sein du championnat. Régulièrement dans le top 3 des meilleurs buteurs du championnat à son poste et n'ayant été que deux fois hors du top 5 (vous pouvez aller vérifier), le Serbe s'est imposé comme une référence à son poste, récompensé par deux fois l'an passé (Meilleur ailier gauche et Meilleur buteur de la saison). Une régularité qui force le respect et qui dure depuis plus de 10 ans : "Il y a pas de secret, ça va être cliché mais je travaille pour ça. Après chaque saison, je regarde mes statistiques et je regarde où ça a été moins bien. Par la suite, j'essaye d'améliorer ces déficits. Mon taux de réussite, c'était ma priorité dernièrement. Je me suis pas concentré sur le fait de mettre des buts, même si ça vient forcément avec une bonne réussite. Au fil des années, tu apprends, il y a beaucoup de ratés qui permettent de s'améliorer".
Le FENIX comme deuxième maison
Cette régularité permet à Nemanja Ilic de s'imposer comme le successeur d'Anouar Ayed, figure emblématique du club occitan et ancien meilleur buteur. Force de travail, le Serbe progresse et s'installe comme une référence à son poste, statut qui lui permet d'être prêté à Barcelone à partir de février 2019, afin de pallier à la blessure de Casper Ulrich Mortensen, blessé au Mondial 2019. Bien que courte, cette expérience dans l'une des meilleures écoles reste un très bon souvenir pour l'ailier gauche : "C'était encore un niveau au-dessus pour moi, par rapport au FENIX, qui était lui aussi déjà un niveau au-dessus du Partizan. J'ai essayé de profiter à fond de ces six mois et une fois que j'étais rentré, j'ai essayé de transmettre à mes coéquipiers ce que j'ai pu apprendre. C'est quelque chose que l'on ne vit qu'une fois dans sa vie de jouer à Barcelone. On a fait aussi le Final Four, ce qui a aussi été une très belle expérience".
Numéro un à son poste au club, l'ailier de 33 ans fait désormais parti des "anciens" du club et voit arriver derrière lui les jeunes pousses du centre de formation, notamment Téo Jarry, jeune ailier gauche de 23 ans. Si il n'est pas son mentor, Nemanja Ilic distille avec soin conseils et ajustements envers le jeune joueur : "J'essaye dès que je vois quelque chose qu'il peut mieux faire, je lui dis. Après, il a beaucoup de talent mais il doit encore travailler, il doit être tout le temps concentré mais il est vraiment bon".
A 33 ans, plus besoin de penser à l'avenir et même si il est trop tôt pour y penser, la question de la retraite mérite d'être posée pour celui qui n'est jamais vraiment parti du club : "J'aimerais bien fini ici ma carrière. Je suis déjà dans ma onzième saison et on est en train de négocier une prolongation donc si tout va bien, je devrais finir ici". Une nouvelle qui rassurera les supporters du FENIX Toulouse Handball pour celui qui, malgré les années et les succès, ne se considère pas comme une légende du club : "Je ne pense pas à ça, c'est secondaire, je suis avant tout là au service du club et je veux juste bien faire mon job. Quand je suis arrivé, il y avait Anouar Ayed, je ne pensais pas rester aussi longtemps ni battre son record de buts donc ce n'est vraiment pas quelque chose de primordial".
Et la Serbie dans tout ça ?
L'Euro 2024, c'est dans un peu plus d'un mois (10 au 28 janvier, ndlr) et si nous n'y sommes pas encore, la compétition est déjà dans un coin de la tête du capitaine serbe : "On a hâte de commencer. On se réunit le 25 décembre puis juste après le nouvel an, on va partir faire un tournoi en Espagne et de là, on décollera directement pour Berlin".
Régulièrement qualifiée pour les grandes compétitions et disposant de joueurs de talent, les Serbes ne performent pourtant pas lors des grands évènements. Quelque chose manque à l'appel, fait défaut à cette équipe, sinon comment expliquer ces différents échecs. Le capitaine de la sélection pense savoir pourquoi : "Quand je suis arrivé dans l'équipe, vers 2012, j'ai connu 10 entraineurs différents. C'est un peu compliqué de travailler dans ces conditions. On a jamais eu de système qui fonctionnait, avant l'arrivée de Toni Gerona il y a trois-quatre ans. Avec son arrivée, il nous a permis de battre des équipes comme la France (2021, 27-24, ndlr) ou encore la Suède. Lors du dernier Mondial, on perd contre des grosses nations de deux buts, donc on est pas loin. On a beaucoup progressé.".
L'arrivée de l'espagnol à la tête de la sélection a été une des meilleures choses qui soient arrivées aux coéquipiers de Nemanja Ilic : "Il nous a apporté beaucoup de tactique, chose qu'on avait pas forcément avant. On travaille plus avec lui.". Avoir un bon coach c'est bien, mais avoir un groupe qui tourne bien c'est mieux : "On a vraiment un groupe d'amis qui marche bien, on s'entend bien et surtout le but c'est de s'amuser ensemble quand on joue au handball. Je suis aussi les différents joueurs serbes, que ce soit mon frère et ses potes à Chartres ou même ceux qui sont en Allemagne. On a un groupe Whatsapp ensemble, on échange régulièrement et il ne s'écoule jamais six mois sans qu'on se voit.".
Dans le même groupe que l'Islande, la Hongrie et le Monténégro, les Serbes auront fort à faire pour passer le tour préliminaire. Un groupe tout de même relevé qui pourrait poser problème à la sélection serbe : "C'est un groupe où tout le monde peut battre tout le monde. Notre premier match, c'est contre l'Islande et le premier match, c'est généralement le plus dur. On va essayer de tout gagner pour finir premier, je pense que c'est faisable". Un groupe qui servira de révélateur pour les Serbes qui, dans l'idéal, aimeraient décrocher une médaille à cet Euro. "Vous regarderez l'Euro, tout le monde va faire son job et ça sera agréable de regarder la Serbie. On espère être complets, ni blessés, ni covidés.".
Mais au-delà de décrocher une médaille, ce qui intéresse surtout le capitaine, ce sont les TQO. Les Jeux Olympiques ne sont donc pas que dans la tête des Français : "On va faire les choses match après match mais on a tous dans la tête les TQO. Si on finit bien, on peut décrocher des places pour ces tournois, notamment si on laisse l'Islande et le Portugal derrière nous, ça va nous permettre de nous battre pour ces tickets et pourquoi pas disputer les Jeux. Depuis 2012, on a participé à aucuns Jeux Olympiques et c'est un rêve qu'on a tous.".
Capitaine modèle de sa sélection et figure de son club, en 10 ans, Nemanja Ilic aura marqué à la fois son pays et le championnat de France, tout en réussissant à se faire une place parmi les grands noms du FENIX Toulouse Handball.
Théo Alleaume