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C. Viudes : "Au Danemark, un handball complètement différent"

, par Lanfillo

Crédit photo : KIF Kolding

Deuxième partie de notre entretien avec Cyril Viudes. Le néo-retraité du handball revient sur les moments plus difficiles qu'il a connus à Kolding, et explique quels seraient les avantages pour un Français de rejoindre le Danemark.

Pour lire la première partie de l'entretien, cliquez sur ce lien.

- Niveau points négatifs, Kolding a connu de gros problèmes financiers ces dernières années. Comment avez-vous vécu cette situation ?

- En toute transparence, on est des professionnels, et si ma famille est au Danemark, c'est pour mon travail. Donc quand, il y a 2-3 saisons, on a accumulé jusqu'à six mois de retard de salaire, et que la banque danoise comme la française vous contactent toutes les semaines pour vous dire qu'il faut faire quelque chose parce que votre économie est en péril, ça devient compliqué parce qu'on est au Danemark que pour ça. On est là pour la passion du handball, mais sans ce salaire, on ne vit pas à l'étranger, d'autant que la vie est super chère au Danemark. Ce n'est pas une opération financière qu'on a fait en restant huit ans là-bas, mais on a fait le choix de rester pour d'autres raisons. Quand on a des retards de salaire, c'est difficile à gérer au quotidien, déjà dans son investissement sportif et professionnel, mais même au niveau familial parce qu'on se demande comment on va faire, on négocie avec les banques parce qu'on continue de croire que l'argent va arriver, et ça crée des tensions. Donc on s'est posé beaucoup de questions, est-ce qu'on part, on voudrait bien rester mais est-ce qu'on est capable d'assumer ça... Ça a été très dur.

Tout ça se répercute évidemment sur le côté sportif. On avait une belle équipe la saison où on a accumulé nos retards de salaire, mais l'équipe est forcément touchée par la situation. Tout le monde perd un peu d'énergie à se demander comment il va payer son loyer, comment il va payer l'école des enfants... On est donc moins performants collectivement, et on s'est retrouvé avec une équipe qui devait encore jouer le titre – c'était l'épopée espagnole comme on le dit ici avec Carlos Ortega comme entraîneur, Antonio Garcia, Niko Mindegia et aussi Konstantin Igropoulo qui parle espagnol – et on a fini au milieu du classement. Les soucis financiers gangrènent tout, sous son propre toit comme sur le terrain. Et forcément, après les résultats ne sont pas bons. Quand on se retrouve, pour la première année pour moi cette saison, à jouer les play-downs, ce n'est pas plaisant.

- Les problèmes financiers sont désormais réglés ?

- Oui, tout a été mis à jour. On a accumulé un mini retard cette année mais qui a été vite réglé. Mais j'ai vu un peu poindre cette année ces soucis au sein de l'équipe, ça se voit direct sur le terrain. Ce sont des choses que j'ai essayé, par mon expérience ici parce qu'il ne reste personne d'autre de cette époque, d'aider le groupe à surmonter ce problème, et aussi les nouveaux dirigeants parce que tout a changé l'été dernier. Et pour les nouveaux dirigeants, le secteur sportif était aussi une nouveauté pour eux. Alors j'ai essayé de faire le lien, d'expliquer à tout le monde ce qu'il fallait faire pour éviter les pièges du passé, pas au niveau financier mais sur la communication au niveau des dirigeants et sur la gestion de ce stress pour le groupe. Mais cette année ça été plus léger. Les repreneurs ont mis beaucoup d'argent dans le club et plus que ce qu'ils pensaient mettre, parce que le trou était plus important que ce qui leur avait été communiqué. On parle approximativement de six millions d'euros quand même. Ces dirigeants ont investi, perdu de l'argent certainement, et ils sont en train d'équilibrer cette dette. Je pense que le club a trois-quatre ans avec une économie qui doit être positive pour combler ce trou-là, mais effectivement il n'y aura pas beaucoup d'argent à donner au secteur sportif. Le temps que les comptes soient équilibrés et que d'autres investisseurs reviennent, je pense que le club retournera dans le top 3-4 des clubs danois.

- Un mot sur le champion, Aalborg ?

- Stable depuis plusieurs années, ce sont eux qui méritent le plus. Ils ont une belle politique sportive : ils prennent des jeunes, les meilleurs talents, et leur donnent du temps de jeu, ils ont certainement une bonne formation aussi. Ils se font dépouiller tous les ans de leurs meilleurs jeunes internationaux, mais ils arrivent à se renouveler en permanence. Si on regarde les résultats, ils ont dû finir dans le top 4 les huit ans où j'ai joué ici et plusieurs fois champion, ils nous avaient battu en finale il y a six ans. C'est une équipe assez jeune, intégralement scandinave, et ça marche. Après, elle n'est pas armée pour aller gagner des titres européens, ou aller dans un Final Four. Peut-être en Coupe EHF, mais en Ligue des champions ils sont trop limités. Avec Skjern l'année dernière en quarts, on avait atteint un peu le maximum. Mais grâce à leur économie, ils se donnent les moyens de se maintenir au plus haut niveau danois et essayer de faire quelque chose au niveau européen.

« Je conseillerais de venir voir ce qui se passe ici »

- Si vous deviez conseiller à un joueur français d'aller jouer au Danemark, quels seraient vos arguments ?

- Déjà, je le répète, le handball est super bien considéré au Danemark. Quand je suis arrivé ici, le premier été, il y avait en direct à la télévision publique les matchs des -21 ans au championnat d'Europe. Et il y a régulièrement sur les chaînes publiques, plusieurs fois par semaine, des matchs de championnat, masculin comme féminin, rediffusés aux heures tardives, mais aussi des émissions de handball spécialisées sur les chaînes publiques, il y en a deux ou trois. Je pense que le Danemark a le plus gros contingent de journalistes et d'équipes de télévision pour le championnat du monde ou d'Europe. Ça c'est plaisant, pas par égoïsme, mais cet engouement pour le handball fait que les gens sont toujours plus souriants et sympathiques avec vous dans votre ville, et avec un respect de la vie privée, et c'est plutôt agréable.

Donc le côté sportif est prédominant, et pour la vie de famille c'est top, parce que le Danemark, ce n'est pas très grand. Les matchs les plus éloignés, c'est à deux heures et demie de bus. Donc je rentre chez moi tous les soirs, je peux être avec ma femme et mes enfants tous les jours. On bouge davantage pour la Coupe d'Europe, mais c'est quand même pour moi le troisième championnat européen, et un championnat où les déplacements sont limités. De plus, je n'aurais peut-être pas pu jouer jusqu'à 37 ans en Bundesliga, ou en France. Au Danemark, le championnat est basé sur d'autres qualités, et en limitant la durée des déplacements, tout ça permet de rallonger la durée de carrière.

- Vous restez pourtant un cas rare...

- Kolding a essayé de s'ouvrir au sud de l'Europe, mais mis à part moi, ça n'a pas été une réussite. Les Espagnols, ça a duré un an. Pareil dans les autres clubs, Isaias Guardiola n'avait pas fait un an à Aalborg [en 2014-2015, avant qu'il signe à Aix, ndlr], l'année où je suis arrivé il y avait aussi Audray Tuzolana à Bjerringbro-Silkeborg qui n'avait pas fait une saison complète. Les clubs reviennent désormais à ce qui a fait leur force pendant des années, la filière scandinave. La plupart des meilleurs suédois, norvégiens, islandais passent par le Danemark, c'est une étape dans leur carrière avant de partir dans les plus gros championnats et les clubs se recentrent dessus. Je ne sais pas si on va revoir rapidement un Français au Danemark, ou alors sur une pige d'un an ou deux dans un club ambitieux. Il faut aussi se faire à la météo : c'est gris, il pleut beaucoup, il fait froid même si ce n'est pas non plus l'Antarctique... ça peut être un peu dépressif comme météo, heureusement que nous, on avait nos enfants, on découvrait la parentalité, ce qui nous a permis de faire le tri. Je pense que ce ne sera pas la destination privilégiée des Français.

Mais il y a une super culture handballistique. C'est un handball complètement différent, ça m'a pris un an dans mon jeu pour m'adapter avec plus de glissement que de position, ce qui était un peu mon fort pourtant. Il y a une culture de la passe, du spectacle. Et la vie dans un groupe est beaucoup plus démocratique ici, ce n'est pas la dictature de l'entraîneur. Tout le monde a son opinion, participe aux échanges pour amener la performance. Je n'ai pas toujours été d'accord avec ça, mais c'est aussi quelque chose à découvrir. Personnellement, dans sa construction en tant qu'homme et en tant que sportif professionnel, ça apporte aussi. Je conseillerais de venir voir ce qui se passe ici.

Propos recueillis par Mickaël Georgeault

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Lamoureux
Lamoureux
4 années il y a

J’ai de très bon souvenirs de son passage à st raphael: excellent pivot et très accrocheur

Richie
Richie
4 années il y a

Merci pour cette interview d’un joueur peu connu en France malgré son parcours peu commun : s’adapter sur la durée à la culture d’un autre pays n’est pas facile

Pirate du PCHB
Pirate du PCHB
4 années il y a

Oui. Mais la victoire du Vardar cette année en ligue des champions prouve que l’on peut quand même continuer à se battre pour son club malgré les soucis financiers!

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