JO
Où en est le Danemark ?
Quarts de finaliste à Londres en 2012, seulement sixièmes du dernier Euro en Pologne et à la recherche d'un titre depuis 2012, les Danois se dirigent vers Rio avec une faim décuplée. Mais aussi, une pression accrue et des soucis à régler.
C'est la nouvelle que redoutait Gudmundur Gudmunsson. En pleine première période du match de préparation face au Brésil (26-26) samedi dernier, son arrière droit Kasper Sondergaard se dirige vers le banc de touche en se tenant la cuisse... Il ne reviendra plus sur le terrain et, lundi, les nouvelles n'étaient pas forcément rassurantes. "Bien sûr que je suis inquiet, Kasper est un joueur très important pour nous" admettait après le match l'entraineur islandais. "Il est touché à la cuisse, juste au dessus du genou. Même avec la possibilité d'échanger, nous n'avons que très peu d'arrières gauchers". Quatorze jours d'arrêt pour une petite déchirure aux ischio-jambiers, tel est le verdict de l'IRM passée en début de semaine. Mais, faute de remplaçant à disposition (Peter Balling, qu'on avait vu à l'Euro, est lui aussi blessé), Sondergaard restera dans le groupe en espérant une guérison plus rapide que prévue.
Demi-centre : Mensah, Olsen ou un autre ?
Cette mésaventure n'est que la dernière d'une série qui a commencé au mois de mai et qui s'est poursuivie la semaine passée, avec l'annonce du forfait d'Anders Eggert. Touché au ménisque du genou gauche en quart de finale de Champions League, Rasmus Lauge Schmidt déclarait alors forfait pour les Jeux, plantant involontairement une belle épine dans le pied de son sélectionneur. Privé de son meneur de jeu titulaire, ne pouvant pas compter sur Thomas Mogensen, en retraite internationale, Gudmunsson est obligé de bricoler, avec des résultats assez mitigés pour l'instant. Face au Brésil, il a alterné entre Mads Mensah Larsen et Morten Olsen sur le poste. Le premier, s'il a compilé un top buts de la saison en une seule mi-temps, a parfois oublié de faire jouer ses coéquipiers tandis que l'ancien Raphaëllois s'est montré trop balbutiant, ratant de nombreuses passes. "Cette équipe a des soucis sur la base arrière, et l'absence d'un demi-centre de métier avec une grosse expérience est certainement le principal" analyse Rasmus Boysen, consultant pour le site Nytihaandbold. "Mikkel Hansen a besoin de beaucoup de vitesse dans le jeu, d'une circulation de balle fluide, exactement ce qu'apporte Lauge Schmidt. Mads est un arrière avant tout, avec une grosse capacité à aller au duel et à shooter de loin, moins à l'aise pour libérer les ballons. Morten, lui, va certainement apporter autre chose, mais il s'est mis trop de pression sur ce premier match." La solution ? Sans doute d'alterner entre les deux, quant on sait que le chevelu du PSG peut lui aussi piger en tant que meneur de jeu, et que Michael Damgaard a également quelques cordes à son arc.
Le blues de Lindberg
Si il y a bien un domaine où Gudmundur Gudmunsson a tranché, en revanche, c'est celui de l'aile droite, où il a choisi de reléguer Hans Lindberg, une des figures de l'effectif, au rang de réserviste. Au profit de Lasse Svan Hansen, le Flensburger, moins charismatique mais tout aussi efficace. Et le Berlinois, vainqueur et meilleur buteur de la Champions League 2013, n'a que très moyennement goûté cette décision, au point de s'en ouvrir dans les médias nationaux. "Je suis choqué. Je ne crois pas que j'aurais pu faire quoi que ce soit de différent, et je n'ai pas joué ma carte personnelle" assène-t-il dans l'ekstrabladet. "Je crois que j'ai toujours joué à un bon niveau et que je ne suis pas dans l'équipe pour des raisons tactiques. Mais si vous voulez savoir ce qui s'est dit, allez voir le coach". De toute évidence, à 35 ans, Lindberg s'attendait à d'autres égards. Au pays, on comprend la décision, sans trop la comprendre quand même. "Avec seulement quatorze noms, il est compliqué d'emmener tout le monde, quand on sait les difficultés qu'a la base arrière, Gudmunsson a préféré se donner plus de solutions dans ce secteur" analyse Boysen. "On peut comprendre pourquoi il le fait, mais mettre Hans Lindberg, un nom qui parle vraiment ici, en tant que réserviste, on ne s'y attendait pas."
Gudmunsson sous la pression
Une façon comme une autre de dire que Gudmunsson s'est mis encore un peu plus de pression, dans le groupe comme en dehors, à l'heure de s'envoler pour Rio. Il se dit que les dirigeants de la fédération, lassés de ne plus voir leurs protégés dans les carrés finaux des grandes compétitions internationales, pourraient bien changer quelques têtes si l'histoire se répétait aux JO. "Il y a de gros espoirs, encore une fois, pour que le Danemark ramène quelque chose de Rio. Tout autre résultat qu'une demi-finale serait une grosse contre-performance" explique Boysen, avant d'insister sur le rôle des médias : "C'est rare que dans un si petit pays, il y ait autant de pression, mais les médias jouent un grand rôle et ne sont pas forcément tendres avec Gudmunsson. Je ne crois pas qu'il pensait qu'il y aurait autant d'attentes en arrivant, et la pression est parfois difficile à contrôler". Un communiquant né comme pouvait l'être Ulrik Wilbek, son prédécesseur, savait en tout cas aplanir les angles tandis que la presse pardonne moins à Gudmunsson, moins policé et qui n'hésite pas à se prendre le bec avec les journalistes danois.
La bonne nouvelle : le retour de René Toft Hansen
Une bonne nouvelle, quand même, au milieu de cet océan de contrariété : le retour en forme de René Toft Hansen. Le pivot du THW Kiel s'est montré à son aise pour son match de reprise face au Brésil, jouant quarante minutes sans appréhension visible. Il faut dire qu'après avoir été blessé en décembre dernier au genou, il a mis les bouchées doubles pour revenir en forme et être apte à embarquer. S'astreignant à six heures de travail quotidien, il a perdu une dizaine de kilos dans l'affaire et pourra donc partir à Rio avec son frère Henrik, son rêve depuis toujours. Avec la fratrie Toft Hansen et Jesper Noddesbo, le poste de pivot est certainement le plus fort de la compétition olympique. Mais il faudra, avant de décoller, trouver les ajustements ce weekend lors de l'Eurotournoi, où le Danemark affrontera l'Allemagne dès vendredi. "Il y a encore beaucoup de pain sur la planche pour poser les choses offensivement" conclut Boysen. "De cette capacité à trouver ses marques rapidement, et cela passe par les deux matchs de ce weekend, dépendra la capacité du Danemark à aller chercher une médaille à Rio".
Kevin Domas